tag:blogger.com,1999:blog-4979220357013902557.post3694876499182528900..comments2024-01-22T19:18:21.741-08:00Comments on MICHEL TERESTCHENKO: Y a-t-il de l'indisponible ?Michel Terestchenkohttp://www.blogger.com/profile/11886715248381049022noreply@blogger.comBlogger2125tag:blogger.com,1999:blog-4979220357013902557.post-55977414237316150462022-12-13T03:58:53.048-08:002022-12-13T03:58:53.048-08:00Partie 2 :
La nature est ainsi faite qu’au momen...Partie 2 : <br /><br />La nature est ainsi faite qu’au moment où les facultés cognitives d’une personne s’affaissent de manière dramatique, son corps et ses fonctions biologiques (immunitaires notamment) subissent un déclin qui lui est globalement parallèle (même si évidemment, cela ne vaut pas pour tous). C’est entre autres pour cela qu’autrefois, si les maladies neurodégénératives étaient également déjà présentes chez les personnes âgées il y a un siècle, elles ne duraient pas longtemps car il s’ensuivait une mort qui était assez rapprochée. Aujourd’hui, avec le développement des sciences et techniques appliquées au champ médical, et notamment dans le domaine de la pharmacopée, on peut prolonger de plusieurs années, voire dizaine d’années, la durée de vie de patients en stade de maladie dégénératives avancées (sans évidemment de progrès pour l’endiguement des démences). <br />Durant plusieurs années, j’ai travaillé en EHPAD en tant qu’aide-soignant durant mes vacances d’été, et j’ai eu l’occasion de prendre en charge des patients totalement grabataires, qui ne parlaient plus, ne mangeaient plus seuls, ne marchaient plus, ne reconnaissaient plus leur entourage, et ne pouvaient plus raisonner. <br />Toutes avaient des traitements, préventifs notamment utilisés couramment : le kardegic (anti agrégant plaquettaire), les anti hypertenseurs, les antidiabétiques, les anticholestérol pour éviter des pathologies cardio-vasculaires comme les AVC ou les infarctus du myocarde qui auraient été susceptibles d’hâter la mort. La moindre infection était traitée. La plus petite carence (une carence en potassium par exemple, extrêmement fréquente dans ces situations là et susceptibles d’entrainer des troubles du rythme cardiaque et donc le décès) était détectée et corrigée. Les stimulateurs cardiaques veillaient à ce que le cœur ne défaillît point. C’est-à-dire que sans avoir recours à des traitements lourds mais à de simples traitements comme ceux évoqués précédemment, la durée de vie des personnes qui n’ont plus que la mort pour horizon et pour délivrance de leur état sans issue est sans cesse repoussée. <br />Il n’y a pas plus ironique que ces croyants qui, à propos des débats sur la fin de vie déclarent : « seul Dieu doit décider du moment de la mort ». Mais cela fait justement belle lurette que Dieu a rappelé à lui ces patients-là ! Si la plupart sont encore en vie (patients déments et grabataires) et tardent à mourir, c’est parce que la technique (au moyen de la pharmacopée principalement et de dispositifs médicaux tels les pacemakers ou les sondes naso gastrique) prolonge leur vie. Mais à quoi bon ? Quel est le but du maintien de ces traitements (qui ont certes souvent été mis en place avant la maladie neurodégénérative) et qui n'ont pour seule conséquence que la prolongation de l’agonie du patient ? Quel est le sens de vouloir perpétuer indéfiniment un déclin inexorable ? Pourquoi ne pas laisser la nature reprendre ses droits ? Pourquoi rester assujetti au nihilisme de la technique ?<br /><br />On peut tout à fait s’opposer à l’euthanasie et refuser l’arraisonnement de la technique et la soumission à elle qui s’en suit. <br />Je suis fort heureux que la technique prolonge la vie de mon grand-oncle (par le biais de la pharmacopée préventive et d’un stimulateur cardiaque) qui a quatre-vingt-dix ans et coule des jours heureux en Corse au près des siens. <br />Je suis en revanche accablé que ce même stimulateur cardiaque éternise l’agonie de mon grand-père (qui l’aurait été tout autant), en EHPAD, frappé comme tant d’autres par la maladie d’Alzheimer, qui ne bouge plus, ne parle plus, ne mange quasiment plus et ne reconnait pas les siens. <br />La technique doit être au service de la personne humaine. Elle ne doit pas agir pour son propre compte et certainement pas contre l’homme. <br />Nicolas Goasnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-4979220357013902557.post-41608115377139017242022-12-13T03:58:18.710-08:002022-12-13T03:58:18.710-08:00Partie 1
Cher professeur,
Votre commentaire su...Partie 1 <br /><br />Cher professeur, <br /><br />Votre commentaire sur la dignité de la personne humaine, issue en partie de la philosophie de Kant, est au fondement de notre droit, particulièrement lorsque celui-ci affirme l’indisponibilité du corps humain. <br />Vous vous interrogez ensuite dans cette perspective sur la fin de vie et l’euthanasie, dont j’aimerais partager avec vous quelques réflexions à ce propos. <br />J’ai eu l’occasion de travailler à plusieurs reprises auprès de personnes âgées (je suis médecin) dont certaines étaient grabataires et souffraient de troubles cognitifs majeurs. Aux stades avancés de la maladie (en ce qui concerne les démences), le patient ne reconnait plus ses proches, a oublié son histoire de vie, ne se mobilise plus seul (parfois il ne peut tout simplement plus marcher), est souvent incontinent, a besoin des autres pour s’alimenter et s’hydrater et n’a plus la capacité de faire usage de sa raison. Il est en somme dans un état de dépendance quasi-totale. Je dois avouer que dans ces moments-là, le fossé s’accroit entre les discours enjolivés sur la dignité humaine et la réalité de la maladie qui s’imposent au quotidien à ces patients. <br />Je n’ai jamais apprécié les raisonnements des penseurs (Nietzsche en tête) qui cherchent mécaniquement un sens caché à toute chose. Chez eux, une action charitable devient le moyen d’exercer subrepticement sa volonté de puissance, un propos visant à soutenir une personne n’est que le procédé déguisé pour augmenter son prestige social etc … Le gratuit devient suspect. <br />Mais quand même ! N’y a-t-il pas un peu de cela lorsqu’on se perd en discours mielleux, verbeux et redondant sur la dignité humaine lorsqu’on aborde la fin de vie ? <br /><br /> J’entends bien qu’il s’agit là de la dignité au sens kantien du terme, c’est-à-dire de la dignité qui est présent en chacun de nous du seul fait de notre existence humaine, sans considération de notre rang social, de notre appartenance ethnique, religieuse ou nationale et indépendamment de nos actions aussi néfastes parfois fussent-elles. Cette dignité est universelle et intemporelle. Elle est présente dès le début et nous accompagnera jusqu’à la fin, aussi difficile que soit cette fin. Je ne remets pas en cause cela. Je ne remets évidemment pas en cause non plus la nécessité vitale d’accompagner, de soigner, de prodiguer de soins et de tendresse ces patients jusqu’au bout. Là est l’honneur de la civilisation. <br />Ce que je remets en cause et interroge cependant, c’est ce « jusqu’au bout ». <br />Lorsqu’un patient est dans un stade avancé d’une maladie neuro dégénérative, il n’a plus aucune perspective de guérison. La dégradation progressive (parfois brutale en fonction de l’étiologie) de ses facultés cognitives, motrices et sensorielles est son seul horizon. Seule la mort mettra un terme à cette altération inexorable de son état. Pourquoi dans ce cas s’acharner à prolonger sa vie de manière indéfinie en demeurant impuissant sur sa qualité de vie ? Si ces situations ne correspondent pas aux principes d’acharnement thérapeutique tels que définis par la loi (l’acharnement thérapeutique pour faire simple concerne principalement le refus de la mise en place de traitements lourds comme des chimiothérapies dans le cadre de cancers avancés qui ne pourraient malgré tout être guéris), je pense que les situations des personnes âgées souffrant de démence dans les EHPAD relèvent également de l’acharnement thérapeutique, mais sous une forme différente. <br /><br />Nicolas Goasnoreply@blogger.com