Je relis pour la énième fois Madame Bovary et mon admiration sans bornes pour chaque ligne de Flaubert grandit encore. Comme je faisais passer aujourc'hui le Grand Oral à Scienes-Pô (Aix), je demandais à un étudiant quels écrivains il admirait.
- "Oh, mais il y en a beaucoup !
- Eh ! bien lesquels, dites-moi. Je veux dire ceux que vous admirez vraiment pas que vous avez lus seulement.
- Keynes, par exemple." Peut-être voulait-il me plaire...
Dieu, qu'on peut être jeune et triste !
Ce n'est pas encore le pire. A l'exception d'une étudiante d'origine bulgare, aucun étudiant ne connaissait qui étaient ceux qu'on appelait "les dissidents". Soljné... qui ? Non, désolé je ne connais pas. Pour quelle raison le Festival d'Avignon est-il connu ? Nous sommes à Aix, n'est-ce pas ? Personne ou presque ne le sait. Pouvez-vous me citer un grand écrivain russe du XIXe siècle ? Ah ! non désolé, ça me me dit rien. J'en passe et de plus belles. La dénonciation est aisée, soit ! Mais là tout de même, les bras vous en tombent. Et le bal des désolations dure depuis bientôt une semaine.
7 commentaires:
Ni Soljé ni Tsyne ni Tchevo.
Certes c'est peut-être un peu triste mais il n'est jamais trop tard pour se mettre à lire ceux qui font vivre...
Pour moi chaque lecture littéraire qui m'a bouleversé fut un séisme, un traumatisme presqu'au sens psychologique du trauma : sans voix ou bien mille voix dans la tête, je ne saurai dire. Trace indébile pour ces lectures-là, parfois liées à une période singulière de la vie.
C'est aussi pour cela : comme le temps fait mûrir les choses, comme le besoin de relire certains livres ou textes, le plaisir grandit avec nous.
M.S.
J'espère que vous avez raison, cher Manuel. Je n'aime guère généralement ce genre de commentaire sur le niveau des étudiants. Mais là, c'était un peu fort de café.
Amitiés,
M.
Je me souviens lorsque je suis entré à la fac. J'étais inculte. Je me disais que j'allais me contenter d'un minimum de connaissances. Que de ne pas connaître certains pans entiers de la culture n'était pas grave et surtout que quoi qu'on en dise la culture est chère.
Je ne dis pas ça nullement pour justifier les carences en matière à la fois d'expression et de sous-culture dont j'étais atteint. Mais je le présente comme l'état d'esprit dans lequel j'ai abordé ces années d'études.
Se faire traiter d'inculte pour moi n'était pas une insulte. C'était tout juste la réalité.
J'ai remédié à cet handicap depuis. Mais ça n'a pas été sans mal ni sans énormément de volontés.
Merci, Marc. Je crois que votre état d'esprit à l'époque est, en effet, assez révélateur. C'est désolant que l'on puisse sortir du lycée avec des lacunes aussi énormes. En même temps, l'école ne guère le goût, moins encore l'amour, de la création (quelle que soit la forme qu'elle prenne). Et c'est vraiment là le plus triste. La "culture", comme on dit, est une affaire de "désir", un erôs qui se nourrit et se développe. Mais ça la plupart des étudiants n'en ont pas la moindre idée. Et je ne dis pas que ce soit entièrement de leur faute, si l'on considère les "valeurs" qui ont cours aujourd'hui...
Et comment le "désir" naît-il ? Comme un nuage, dans une relation invisible avec les océans ? Ou comme la mer par l'aboutissement évident de toutes les rivères ?
Oui c'est vrai beaucoup d'amis profs me font part de ce même désespoir. Et pourtant j'observe que ces jeunes savent beaucoup de choses que nous ne savons pas. Ils ne connaissent pas Chopin mais connaissent d'autres cultures musicales trop rapidemment dénigrées. Un enfant aujourd'hui est soumis (je choisis bien ce mot) à tellement d'exigences d'apprentissage qu'il n'apprend plus ce qui pour certain à de l'importance et même de la valeur. Ne les condamnons pas!
Plus que chez les étudiants, je m'inquiéterait de ces lacunes chez les politiciens et les techniciens de notre temps. Même si tout cela est bien entendu lié; les étudiants d'aujourd'hui seront les dirigeants de demain...
Bonnes vacances!
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