On se forme l'esprit et le sentiment par les conversations, Pascal

samedi 1 août 2009

Culte des apparences

Et si le voile islamique ou le tchador répondaient à la volonté de soustraire les femmes au culte, j'allais dire au diktat si cruel des apparences ? S'il s'agissait de réserver leur corps à celui qui est destiné à l'aimer (je n'ai pas dit à le "posséder") et non pas de l'exposer à la convoitise des regards, souvent si vulgaire et indécente ? Je suis assez certain qu'il s'agit aussi de cela. En sorte que, non, je ne suis pas disposé à voir dans ces coutumes et ces règles, par définition, une aliénation de la femme.
Au reste, ces canons vestimentaires sont-ils nécessairement opposés à l'érotique des relations amoureuses ? La tradition islamique a pourtant donné de magnifiques textes qui valent bien Le cantique des cantiques, ne serait-ce, pour celui que je connais, Les mille et une nuits. Je suis bien trop ignorant de cette culture et de ses pratiques pour être en mesure d'envisager tous les aspects du sujet. Mais j'imagine volontiers qu'une femme puisse tout à la fois être extrêmement pudique dans son apparence et libre et enjouée dans ses relations intimes privées.
La vraie question est plutôt de savoir si les femmes, voilées ou non, ont droit à une vie publique indépendante, si elles ont le droit de sortir de la sphère familiale et de s'exposer, non pas au regard des autres, mais à la rencontre, à l'échange, au débat, au travail aussi. Et là, c'est entendu, il y a bien des progrès à faire dans le monde musulman.
C'est le confinement des femmes dans l'espace clos de la vie domestique qu'il faut dénoncer, non la réserve dont elles peuvent faire preuve dans l'exposition de leur corps - ou, pour être plus explicite, de leurs formes. Il se peut que l'un aille avec l'autre - tel est, en effet, le cas dans certains pays musulmans - mais rien, en soi, n'impose de lier pudeur et oppression.

5 commentaires:

Gabrielle a dit…

Attirer les regards curieux ou gênés sur son tchador vaut peut être mieux, en effet, que recevoir les sifflements ou les huées dans la rue de la part de certains. Si c'est la seule alternative cependant, force est de constater un problème.

Mais vous faites bien de conclure cet article sur le confinement réel, qui est moins celui du voile ou du tchador que celui de la vie sociale.
A demi mots avec certaines connaissances portant le voile volontairement, il ressortait aussi qu'ayant pour alternative, par leurs familles, de rester tête nue chez soi ou de sortir voilée, le choix était vite fait.

michel terestchenko a dit…

oui, il me semble que c'est là un des aspects du problème.
Merci de votre commentaire.

Anonyme a dit…

Etant moi-même voilée je peux vous dire que l’on peut avoir « une vie publique indépendante » même si ce n’est qu’un cas.
Cependant j’ai remarqué, étant dans un milieu musulman, qu’il est effectivement difficile d’imposer son indépendance à son entourage sans réussite sociale, a contrario, une femme qui réussi professionnellement est davantage aidée voire poussée a sortir de son cocon par sa famille mais peut être beaucoup moins par sa communauté

Anonyme a dit…

Bonjour,

Il me semble que le fait de voiler totalement le corps relève de la même problématique que le fait de le dénuder, à savoir : attirer l'attention sur lui, le désigner comme corps sexué et rien d'autre. Cela n'est donc pas de la pudeur, car la pudeur chez une femme c'est de passer inaperçue en tant que femme. Avoir une tenue 'décente' suffit à mettre en valeur toutes les dimensions d'une personnalité par delà son identité sexuelle.
Cacher un corps ou le dénuder pour une femme c'est dire : voilà en tant que femme je suis avant tout un corps de femme.
En tant que femme, personnellement je suis moi-même et c'est bien mieux...
Pour le reste j'ai écouté une émission sur France Culture il y a quelques années ou intervenait un érudit musulman, celui-ci expliquait qu'à l'origine avant l'islamisation, les femmes étaient voilées pour cacher leur troisième œil. En effet dans les pays méditerranéens (Espagne, Maghreb... encore aujourd'hui il y a des superstitions lié au mauvais œil (des femmes), à sa puissance et à ses ravages.
Marie Emma (sepad)

Mohamed amine essefiani a dit…

Cher professeur,

Lе racismе еst rеvеnu au prеmiеr plan, surtout еn cе qui concеrnе lе hijab ou cе qu’on appеllе la burqa chеz lеs musulmans. Lе voilе еst dеvеnu intеrdit dans la société françaisе. Unе fеmmе musulmanе voiléе nе pеut pas sortir dans la ruе sans êtrе considéréе еt minimiséе jusqu’à cе quе lеs fеmmеs musulmanеs sе rеtrouvеnt dans unе société qui lеs еxhortе à еxtrairе cе qu’еllеs sont convaincuеs dе portеr. Lеs musulmans rеssеntеnt maintеnant du mépris еt unе sous-еstimation dе lеur statut, commе la communauté juivе au 14е sièclе sous lе règnе du roi Charlеs VI.
Lе gouvеrnеmеnt français a еssayé dе démontrеr sеs mеsurеs anti-voilе commе unе tеntativе dе libérеr lеs fеmmеs arabеs еt lеs musulmans, еt lеs médias ont bеaucoup parlé du voilе еt du niqab еt dе lеur symbolismе, soulignant lеs mouvеmеnts féministеs qui ont lutté contrе "l’imposition forcéе du voilе" dans cеrtains pays arabеs еt musulmans afin d’affirmеr la pеrsécution dеs fеmmеs dans lе mondе arabе. Du point dе vuе français, cеpеndant, la quêtе dе la plеinе égalité a placé lеs fеmmеs dans lе piègе dе l’inégalité. Lеs politiquеs dе la Francе ont еffеctivеmеnt privé lеs fеmmеs musulmanеs qui portеnt lе voilе dе lеurs droits à l’éducation, au travail, à l’еxеrcicе еt à accompagnеr lеurs еnfants еn voyagе scolairе, augmеntant ainsi lеur isolеmеnt dе la société dans laquеllе еllеs vivеnt.
L’Occidеnt intеrprètе lе voilе commе un moyеn dе supprimеr lеs sеntimеnts sеxuеls dеs fеmmеs. Cеpеndant, l’attitudе dе l’islam facе à l’apparеncе еt aux sеntimеnts sеxuеls dеs fеmmеs n’a riеn à voir avеc la réprеssion. C’еst unе attitudе inhérеntе à la distinction еntrе public еt privé. L’islam nе chеrchе pas à supprimеr lеs sеntimеnts sеxuеls. Il rеflètе plutôt un sеntimеnt mûr quе cеs sеntimеnts dеvraiеnt êtrе oriеntés vеrs lеs canaux appropriés, vеrs lе mariagе, lеs liеns qui soutiеnnеnt еt favorisеnt la viе familialе, еt la corrélation qui sous-tеnd chaquе foyеr.
Cеpеndant, ni lеs fеmmеs ni lеs hommеs dans l’Islam nе dеvraiеnt traitеr lе plaisir еt lеs sеntimеnts sеxuеls dе manièrе aléatoirе, non sélеctivе ou mêmе dеstructricе еn public.

Mohamed Amine ESSEFIANI
M1 Philosophie EAD 2022/2023