"Maintenant que vous êtes face à l’énormité de la tâche, y a t-il un problème qui vous paraisse insoluble ?
Je ne pense pas qu’il existe de problèmes insolubles. Mais il y en a quelques-uns qui sont extraordinairement compliqués. Il n’est pas certain que l’économie ait atteint son plus bas niveau. Même si nous adoptons toutes sortes de mesures, il n’est pas dit qu’elle aura totalement récupéré dans deux ans. Je ne doute absolument pas de notre capacité à remettre l’économie sur les rails, mais nous devons commencer par sortir du trou que nous avons creusé. Avant même de pouvoir parler d’un plan de relance efficace, j’hériterai d’un déficit d’au moins 1 000 milliards de dollars. Nous sommes en outre en présence d’un déficit structurel qui imposera des décisions très difficiles. Faire repartir l’économie à court terme et établir une politique budgétaire responsable sur le long terme, à un moment où les foyers américains subissent la crise de plein fouet et où tant de besoins ne sont pas satisfaits, voilà un énorme problème. Je ne pense pas que nous puissions le résoudre d’un coup de baguette magique. Il faudra équilibrer soigneusement les priorités, et nous commettrons certainement des erreurs dans la foulée. Car certains de ces choix se heurteront à des résistances politiques, pas seulement de la part des républicains, mais également dans mon propre camp.
D’autres problèmes m’empêchent de bien dormir. Je pense, par exemple, que l’Afghanistan sera un défi. Je suis certain que le retrait de nos troupes d’Irak est la bonne chose à faire. Je pense que nous pouvons effectuer ce retrait de façon raisonnable et stabiliser la situation en Irak. Nous allons devoir prendre des initiatives militaires, mais aussi diplomatiques, afin d’engager pleinement le Pakistan comme allié dans la région, de désamorcer les tensions entre l’Inde et le Pakistan, pour ensuite impliquer tout le monde dans l’éradication des mouvements militants sur un territoire, sur un terrain qui est très dangereux – dans un énorme pays qui est l’un des plus pauvres et des moins développés du monde. Je pense que ce sera une situation très difficile. La troisième chose qui occupe mes nuits est la question de la prolifération nucléaire. Nous allons devoir prendre des initiatives pour raccommoder un régime de non-prolifération qui a été malmené. Et ce alors qu’Internet a rendu les techniques de fabrication d’armes de destruction massive plus accessibles que jamais, à un moment où de plus en plus de pays chercheront à se doter de programmes d’énergie nucléaire. Ce sera là un défi particulièrement important.
Enfin, pour couronner le tout, il y a le changement climatique. Tous les indicateurs montrent qu’il progresse plus vite que ne le prévoyaient il y a encore deux ou trois ans les chercheurs les plus pessimistes. La communauté internationale devra consentir un énorme effort pour s’y attaquer sérieusement. Et cet effort aura un coût. Or mettre en place les conditions de cette transformation – qui présente d’immenses opportunités en termes de croissance économique et de créations d’emplois à long terme, mais coûtera cher dans l’immédiat – est la chose la plus difficile à faire en politique. Cela implique d’engager de lourds investissements qui ne porteront leurs fruits qu’à long terme. J’arrête ici la liste.
(...)
Quel est votre secret pour si bien tenir tête à de grosses organisations et relever aussi rapidement des défis, que ce soit dans la façon dont vous avez mené votre campagne ou maintenant ?
Il n’y a pas vraiment de secret. Je crois que je sais repérer les talents et que j’embauche donc des gens compétents. Ayant un ego assez sain, je n’hésite pas à recruter les gens les plus intelligents, même s’ils le sont plus que moi. Je tolère en revanche très mal les gens qui brassent du vent, cherchent à protéger leur territoire ou se livrent à des petits manèges, et je le fais savoir d’emblée très clairement. C’est pourquoi, au bout d’un moment, des rapports de confiance commencent à s’installer entre les gens, qui se concentrent sur leur mission et non sur les ambitions personnelles ou les conflits. A partir du moment où on a des gens très compétents qui s’investissent tous dans la même mission, on arrive généralement à faire avancer les choses."
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