Le plan présenté par Henry Paulson, le secrétaire au Trésor, a été rejeté hier après-midi par la Chambre des Représentants, plongeant la bourse américaine dans une chute historique. De tous cotés fusent des critiques contre ce plan qui déplaît à beaucoup de monde, partie pour des raisons techniques - il serait inefficace et aisément contournable - partie pour des raisons de principe. Le journal Le Monde, dans son édition de ce jour, rapporte les propos de Mike Pence, réprésentant républicain de l'Indiana : "La liberté économique recouvre la liberté de réussir et la liberté d'échouer. Donner au gouvernement fédéral la possibilité de nationaliser pratiquement tous les emprunts suspend cette vérité fondamentale de notre économie". Mais cette "vérité fondamentale", qui est au coeur du credo néo-libéral, faut-il s'y tenir coûte que coûte ? C'est au nom du principe de responsabilité que le secrétaire au Trésor et le président de la FED, quelle que soit la qualité de leur tentative désespérée, jugent nécessaire de déroger au principe sacro-saint de l'autocicatrisation du marché et de la non-intervention de l'Etat. Fort bien ! Mais tous ne l'entendent pas de cette oreille. Ainsi notre représentant, ajoute-t-il en bon croyant : "Si vous êtes venus ici parce que vous croyez [eh oui, il s'agit bien d'une croyance !] au gouvernement limité et au libre marché, votez en accord avec vos convictions. Le devoir est le nôtre ; les résultats appartiennent à Dieu". Formidable ! Notre homme aurait pu citer Weber qui définit, en ces termes, la fameuse distinction entre l'éthique de la conviction et l'éthique de la responsabilité. Il existe "une distinction abyssale entre l'attitude de celui qui agit selon les maximes de l'éthique de la conviction - dans un langage religieux nous dirions : "le chrétien fait son devoir et en ce qui concerne le résultat, il s'en remet à Dieu" et l'attitude de celui qui agit selon l'éthique de la responsabilité qui dit : "Nous devons repondre des conséquences prévisibles de nos actes" (Le savant et le politique, La Découverte, 2003, p. 172, souligné par moi).
Il est heureux qu'il se trouve, dans les présentes circonstances, des hommes de conviction et de foi pour garder la tête froide, et nous rappeler au devoir de rester fidèles à cette vérité dogmatique que c'est Dieu qui a institué les lois du marché auto régulé. Vous n'aviez pas trouvé cela dans les Ecritures ? C'est que vous ignorez que la Révélation se poursuit de jour en jour. Autrement dit : n'ayez pas peur, soyez fidèles, ne soyez pas responsables, la Providence veille ! Je ne sais pas ce que l'auteur de la formule penserait de cette interprétation...
1 commentaire:
"En outre, pour certains, tel l'économiste Nouriel Roubini, il [le plan Paulson] ne répond pas à deux impératifs majeurs: l'urgente nécessité de recapitalisation des banques et l'allègement de la dette des ménages."
Les Echos, 30 septembre 2008.
Préférons la deuxième raison à la première (même s'il faut certainement satisfaire les banques) car ce sont les contribuables les vraies victimes de la crise.
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