Laissons de côté l'épineuse question de savoir si la notion de "nature humaine" n'a d'autre sens que culturel ou biologique, étant, pour certains, plutôt un mixte des deux. On voudrait aujourd'hui qu'elle ne signifie rien de plus que cela. Mais il n'est pas nécessaire de lui donner une portée métaphysique, moins encore théologique, pour s'apercevoir que, envisagée du point de vue l'expérience humaine, elle varie assez peu. Il n'y a sans doute rien de commun entre la Chine du Ve siècle avant Jésus Christ et nos sociétés contemporaines, mais d'où vient alors que nous puissions encore lire les "penseurs" de cette époque et faire nôtre certaines de leurs réflexions ?
Si vraiment tout nous séparait des hommes du passé, la langue, la culture, la manière en somme d'être présent au monde, nous ne pourrions lire ni rien compendre à Homère, à l'Ancien Testament, à Shakespeare, à La Rochefoucauld ou à Dostoïevski, et je ne parle pas des philosophes. Au reste, où devrait-on placer le curseur temporel lorsque la conscience historique disparaît au point que tel événement, vieux de cinquante ans, paraît aussi lointain que le Moyen-Age, c'est-à-dire que la préhistoire. Si la "culture" - quel terme détestable ! - a un mérite, c'est tout d'abord de rétablir ce lien entre les hommes - qu'ils soient d'ici ou d'ailleurs, d'hier ou d'aujourd'hui - que l'absence d'effort, d'intérêt, de compréhension et de sympathie détruit dans tous ses aspects, pour nous laisser sans racines ni horizon.
Qu'il y ait, malgré tout, une communauté humaine, capable de s'entendre à travers les lieux et les âges, j'en veux pour seul exemple cet aphorisme admirable et si tranchant de Confucius qui donnerait à sourire n'était-ce la vérité amère qu'il exprime :
"Pourquoi m'en veux tu autant, je ne t'ai pourtant rien donné"...
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