Pour revenir, un instant, sur un précédent billet et rebondir sur une remarque que m'a faite mon ami le philosophe Jacques Dewitte.
Pas plus que tout autre science, la neurobiologie ne nous fait connaître de vérités "absolues". Du moins, en l'occurrence, nous permet-elle de mieux comprendre et d'apporter un élément d'explication à un phénomène que nous expérimentons quotidiennement : une certaine obstination de l'esprit - au sens où l'on parle d'un esprit "fermé" - qui rend incapable de s'ouvrir à la réflexion critique et à la possibilité de revenir sur ses opinions. C'est d'abord de cela que le travail philosophique s'efforce de nous délivrer, réclamant de nous cette constante "disposition sceptique" qui était le propre de Socrate et qui constitue son legs le plus précieux : l'ouverture à la réfutation, à la critique, au doute sur ses propres idées, au débat - serait-il purement intérieur, s'exerçant dans un face-à-face avec soi, ce "double en un" qui caractèrise, selon Hannah Arendt, l'exercice de la pensée - où l'argument rationnel doit l'emporter sur l'opinion ou la croyance. C'est précisément cette capacité de "prendre ses distances" avec soi, d'écouter les arguments des autres, et d'entrer dans leur jeu si l'on peut dire, ou encore d'être à soi-même son propre objecteur, que le sentiment, dans son immédiateté et son caractère envahissant, refuse et interdit.
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