Ce dimanche matin me revient le souvenir d'une curiosité historique que je livre à votre imagination.
Florence, 1504.
Cette année-là, selon les plans établis par Léonard de Vinci, furent entrepris par les entrepreneurs florentins de gigantesques travaux de diversion de l’Arno, afin de réduire la ville de Pise à la soumission. La décision avait été prise par la Seigneurie le 20 août 1504, après que diverses tentatives militaires eurent toutes échouées. Le 12 octobre le projet fut abandonné. Un nombre insuffisant d’hommes commis à la tâche et les erreurs techniques de l’ingénieur en hydraulique, Colombino, en particulier la profondeur insuffisante des fossés qui devaient entraîner la diversion des eaux, furent cause que la rivière retourna à son ancien cours.
Plusieurs lettres écrites par Machiavel en septembre 1504 montrent son active participation à cette entreprise qui dépassait dans l’esprit de Léonard la seule fin militaire puisque c’était là, à ses yeux, la première phase d’un projet beaucoup plus important et ambitieux visant à rattacher la ville de Florence à la mer.
On sait ainsi que se connurent et travaillèrent ensemble Léonard de Vinci et Nicolas Machiavel, ces deux plus grands esprits de la cité florentine, si différents en tous points. Le beau livre de Roger D. Masters, Fortune is a River, Leonardo da Vinci and Niccolo Machiavelli’s Magnificent Dream to Change the Course of The Florentine History (A Plume Book, 1999) fait le récit de cette rencontre étonnante et peu connue.
Songez un peu au merveilleux scénario que l'on pourrait tirer de cette histoire dont s'est emparé le récent roman de Patrick Boucheron, Léonard et Machiavel (Editions Verdier, 2008).
Je tiens en réserve, si vous le désirez, quelques autres anecdotes de la vie de Machiavel, dont l'une, en particulier, est formidablement drôle. On ne sait pas assez que Nicolas était doué d'un grand sens de l'humour et que certaines de ses lettres étaient si facétieuses que ses collègues de bureau en hurlaient de rire, le pressant de revenir au plus vite lorsque les affaires le tenaient trop longtemps éloigné de Florence. Au reste, il est également l'auteur de deux comédies, La mandragore et La Clizia, que l'on ne joue plus guère. Sa personnalité, tellement attachante, est à mille lieux de l'idée que l'on se fait de l'auteur impassible du Prince, ce bréviaire du bon usage du mal en politique.
Santi di Tito (1536-1603), Portrait de Machiavel. Palazzo Vecchio, Florence.
Ce portrait posthume de Machiavel est exposé au deuxième étage du Palazzo Vecchio à Florence, dans son ancien bureau de Secrétaire des Dix.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire