On se forme l'esprit et le sentiment par les conversations, Pascal

samedi 1 novembre 2008

Vanité d'auteur

Il faudra un jour s'expliquer sur cette fameuse "vanité d'auteur". Mais s'agit-il, lorsqu'on écrit, de se mettre en scène ? Il y a sans doute le plaisir du travail lui-même, qui est aussi fait de longues et pénibles périodes de vide. La documentation préparatoire une fois réunie, c'est un chaos foisonnant où tout part aux vents les plus divers et qui, pour être mis en ordre, exige que l'on mette ses idées au clair. Il n'est pas de sujet qui n'exige tout d'abord qu'on ne s'y perde. Les chercheurs, étudiants ou hommes de métier plus aguerris, savent ce que ce préalable exige de silence et de patience, d'angoisses, de découragements et de doutes surmontés, pour que la composition finale se dégage au terme d'une obscure et laborieuse alchimie. Puis l'écriture qui vient, parfois avec une rapidité inattendue, mais qu'il a fallu attendre sans s'y précipiter - de là vient le défaut de bien des livres : ils ont été écrits avec une trop grande hâte. Et au moment de la rédaction, le plaisir de s'adresser à un lecteur idéal, qu'on imagine à la fois bienveillant et exigeant, où l'on s'extirpe enfin de la pesante réflexion de soi à soi.
Je n'imagine pas le fait d'écrire un livre autrement que comme une forme d'ouverture aux autres, attente d'un dialogue que l'on espère et qui, viendra-t-il un jour, est, pour un auteur, sa plus belle récompense. Je ne dis pas que le désir de satisfaire les appétits de l'ego soit inexistant - au reste, la quête de la reconnaisssance n'a rien de méprisable en soi -, mais c'est d'abord d'un travail dont il s'agit qui, comme tout travail, a ses lois, source de joies et de peines, et qui se nourrit de l'espérance, sinon de la promesse, d'un partage. Au bout du compte, un livre est le fruit d'un travail artisanal que l'on polit avec soin, pour qu'à cette table bien faite et qui tienne sur ses quatre pieds les autres aient envie de s'asseoir et de discuter ensemble avec courtoisie et aménité.
Mais écrire pour faire le fanfaron, plaire et séduire, connaître le succès ou obtenir un peu de notoriété ? Le pari est pour le moins incertain. Aucun bon livre n'est jamais sorti de là, voudrait-on comme le jeune Hugo être Chateaubriand ou rien.

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