Ce ne sont pas les citoyens des Etats qui déclenchent la guerre, mais les Etats et leurs gouvernants et si ces mêmes citoyens, généralement des hommes, s'affrontent ensuite à mort sur le théâtre des opérations, c'est que une fois revêtus de l'uniforme et intégrés dans un corps d'armée où ils devront obéir aux ordres de la hiérarchie, se réalise une sorte de transubstantiation négative où l'individu, dépouillé de sa singularité unique et du sens de l'humanité commune, est politiquement transformé en un « soldat » dont la tâche est de combattre et de détruire « l'ennemi ». S'il convient de placer ces mots entre guillemets, c'est qu'ils ne désignent plus les êtres humains et leurs relations que sous la forme atrophiée de pures et simples abstractions. Le combattant est désormais réduit à cette identité factice, quoique cette réduction soit rarement assez entière pour le conduire à s'engager et à combattre de tout son être ; quant à l'ennemi, il n'y aura pas grande difficulté à le déshumaniser, à le réifier, voire à l'animaliser et ce sera ou bien un « sale Boche », « un Jaune », « un cafard », tout ce qu'on voudra, les mots ne manquent pas à la propagande officielle pour conduire les hommes à se massacrer et à s'exterminer les uns les autres sans états d'âme. Tout cela appartient, on le sait trop hélas, au monde de la guerre, à sa rhétorique bestialisante, à sa raison meurtrière. Mais que se passe-t-il si, effaçant la figure abstraite de l'ennemi, de la cible à abattre, réapparait soudain la réalité de l'homme dans son humanité, sa fragilité et sa vulnérabilité ? Telle est l'expérience que fit Georges Orwell pendant la Guerre d'Espagne où il s'était engagé pour lutter contre le fascisme, et dont le récit se rapporte à de nombreuses expériences semblables1 :
À cet instant, un homme qui devait probablement porter un message à un officier jaillit de la tranchée et se mit à courir, complètement exposé, sur le sommet du parapet. Il était à moitié nu (half dressed) et, tout en courant, retenait son pantalon avec ses mains. Je m'abstins de tirer sur lui. Il faut dire que je suis un assez piètre tireur, guère capable de toucher un homme en pleine course à cent mètres de distance […] Reste que ce si je n'ai pas tiré, c'est en partie à cause de ce petit détail de pantalon. J'étais venu ici pour tirer sur des « fascistes », mais un homme qui retient son pantalon n'est pas un « fasciste », c'est manifestement quelqu'un de votre espèce, un semblable, sur lequel vous n'avez pas envie de tirer (and you don't fell like shooting at him).
La retenue dont Orwell fit preuve en cette occasion ne résulte pas de l'obéissance à un devoir moral ou à un commandement religieux qui se serait imposé dans sa majesté impérieuse et implacable. Ni la morale ni la religion ne permettent de rendre compte de ce qu'il éprouva lorsque apparut soudain dans son viseur ce soldat courant demi-nu sur le parapet, tenant à deux mains son pantalon. Toute la formidable entreprise mentale et idéologique qui avait placé sur l'ennemi l'étiquette générique de « fasciste » - et les guillemets indiquent très précisément cet étiquettage déshumanisant – s'était à l'instant même effondrée pour ne plus laisser place qu'à la vision d'un pauvre petit gars, surpris dans le comique et le dérisoire d'une condition commune, « manifestement quelqu'un de votre espèce, un semblable ». Ce n'est pas un interdit qui retint le doigt d'Orwell d'appuyer sur la gachette, rien de plus que la conscience que, dans cette situation-là et face à cet homme-là « vous n'avez juste pas envie de tirer ». Ce qui est bien peu au regard des obligations fortes de la conscience morale, mais suffisant, et c'est assez et c'est immense, pour arrêter l'entreprise meurtrière qu'autorise la guerre. Ce qui rend celle-ci possible, la condition de son déploiement, cesserait aussitôt si à chaque fois disparaissait la figure abstraite de l'ennemi, la cible à abattre, pour laisser place ce qu'il est réellement et que nous sommes tous : métaphoriquement, des êtres à demi-nus retenant des deux mains notre pantalon de tomber.
Si nous devions réunir en un seul trait le travail de « dépolitisation du monde » qui constitue selon Stefan Zweig, la tâche de l'artiste et auquel son profond pacifisme le conviait2, il tiendrait à soi seul dans ce petit détail du pantalon. Dépolitiser le monde, c'est échapper à l'enfermement politique auquel nous condamnent les Etats-nations, avec leurs frontières, leurs identités qui intègrent autant qu'elles excluent, et voir en tout homme ce semblable qu'il est, un pauvre petit gars, saisi à demi-nu dans son humanité fragile et vulnérable, que l'on ne peut ni viser ni tuer, non parce que cela est interdit – en cas de guerre, abattre l'ennemi est tout au contraire un devoir – mais parce qu'on en a tout simplement « pas envie », qu'on ne se sent pas de le faire. Le petit détail du pantalon que rapporte George Orwell est plus qu'une anecdote : présent à l'esprit, il suffirait à constituer, à soi seul, un coup d'arrêt à l'effroyable entreprise politique de destruction qu'est la guerre. Seulement voilà, l'emportent généralement l'étiquette qui fera de l'homme une cible, l'uniforme avec son arsenal d'armes de combat et le doigt sur la couture du pantalon, non pas abaissé, mais dressé sur les jambes d'un corps droit comme un I.
__________
1. Voir Michael Walzer, Guerres justes et injustes, chap. 9, trad.Simone Chambon et Anne Wicke, Folio, Gallimard, 2006.
2. L'expression « dépolitisation du monde », se trouve dans le chapitre intitulé « En quoi l'art et la science peuvent-ils contribuer à rapprocher de nouveau les peuples », in Ecrits littéraires, d'Homère à Tolstoï, trad. Brigitte Cain-Hérudent, Albin Michel, 2021, p.234.
14 commentaires:
Celui qui ne prend pas les armes dans un conflit est souvent considéré comme un lâche. On comprend mal les "objecteurs de conscience", les "pacifistes", d'autant plus s'ils aiment leur "patrie". La plupart des films holywoodiens mettent en scène les héros qui décident de prendre les armes, qui se relèvent pour combattre la "noble cause", afin de mettre à terre le "pays injuste". Il est plus rare de voir mis en scène l'obstination d'un homme pour ne pas prendre les armes, quitte à y laisser sa vie et abandonner sa famille. L'imaginaire des hommes modernes est resté guerrier. La violence est même devenue un sujet culturel de divertissement grand public, la guerre est un thème banal. La télévision et les réseaux sociaux nous abreuvent de faits divers où les hommes s'entre-tuent. Les jeux vidéos relaient en masse ce réflexe de la violence jouissive.
Plus rare sont les films qui font l'apologie de l'objection de conscience, surtout lorsqu'il s'agit d'un homme qui s'oppose à une guerre injuste, en s'appuyant sur une histoire vraie. C'est pourtant le cas du film "une vie cachée" en 2019 de Terrence Malick : un homme, chrétien, accepte d'être exécuté plutôt que de prendre les armes contre les russes au service du régime nazi. Il pose cette question essentielle : devons-nous prendre les armes en tant que citoyen si l'on considère que la guerre menée par son propre pays est injuste ? La guerre du Vietnam avait fait émerger cette question de plus en plus fortement, au point que l'Etat américain soit forcé d'arrêter le conflit.
Qu'en est-il dans le conflit russo-ukrainien ? Dans sa trajectoire dictatoriale, la Russie étouffe autant que possible les actes de résistance de sa propre population. Nombreux sont ceux qui considèrent cette guerre injuste et le manifestent, au péril de leur vie. Ainsi de la journaliste qui s'est exposée courageusement à la télévision russe et s'est retrouvée en prison. La guerre moderne ne consiste plus seulement dans la confrontation des Etats-Nations et l'asservissement du peuple à une idéologie. Les réseaux sociaux ont cet avantage de permettre la diffusion d'informations de manière rapide et massive. Plus les drames humains seront connus et plus l'opinion publique russe viendra se retourner contre cette guerre qui lui deviendra de plus en plus insupportable.
La fin de la guerre ne viendra ni de la conquête ni de la défaite de l'un ou de l'autre des Etats nations. Ce n'est jamais le cas. Elle viendra comme toujours de l'apaisement des peuples et de la coopération au service d'une cause supérieure. La France et l'Allemagne l'ont appris, après beaucoup trop de sang versé. Les réseaux sociaux n'existaient pas. Cette nouvelle épreuve des temps modernes fera-t-elle émerger plus rapidement que dans la guerre du Vietnam la victoire de l'opinion publique sur l'idéologie d'un Etat ? La question reste ouverte à ce stade.
Je suis plus que d'accord avec vous sur le sujet. Je ne connaissais pas du tout l'histoire du soldat à moitié nu, retenant son pantalon avec ses mains tout en courant sur le champ de bataille de George Orwell. Et pour dire ce détail, qui est plus qu'une simple anecdote (là aussi vous avez raison), permet de se rendre compte de tout le déclin du concept d'humanité en tant de guerre. Si ce soldat n'essayait pas de retenir son pantalon de tomber à ses pieds, peut-être que George Orwell n'aurait pas eu cette envie de ne pas tirer précisément ? Peut-être aurait-il tué cet homme sans une once de culpabilité, ou en tout cas, l'acte de tuer l'autre aurait quand même été commis. C'est malheureux pour moi de l'admettre qu'il nous faut (nous les Hommes) voir "l'ennemi" comme vous dites si bien, perdre un pantalon pour se rappeler que cet "ennemi" est un être humain tout comme nous, nos familles, amis, et ceux qui combattent à nos côtés et dont tous ces êtres auraient pu être du mauvais côté de l'histoire, s'il y en a un.
Ce que dit Samuel est tout aussi très juste. La guerre, la violence, les armes sont devenues banales dans notre monde et à notre époque. Pourtant, notre monde continue d'évoluer et avec lui, la violence change peu à peu, les armes sont de plus en plus destructrices, la guerre de moins en moins un champs de bataille comme à l'Antiquité, au Moyen-Âge ou encore comme lors de la Première Guerre Mondiale. Dorénavant, nous n'avons - malheureusement - plus qu'à appuyer sur un bouton pour que des villes s'effondrent, des pays soient détruits, des soldats, citoyens, familles meurent.
La déshumanisation est bien l'une des pires choses qu'on a pu créée, malgré nous... et l'Histoire nous le prouve encore et encore... Le mieux que nous puissions faire est bien de ne jamais oublier le passé, nos erreurs déjà nombreuses et c'est pourquoi les commémorations existent aujourd'hui : pour que l'on se souvienne. Il faut maintenant apprendre à vivre avec, comprendre que ce que nous faisons, comprendre que nous ne faisons qu'un. Et alors que nous sommes tous l'"ennemi" de quelqu'un, nous devrions tous devenir l'homme qui court en essayant de retenir son pantalon des uns et des autres pour stopper tous ces conflits et ordres dont nous n'avons juste pas envie de faire et plus qu'inutiles.
Le texte de M. Terestchenko comporte, me semble-t-il, certaines ambiguïtés.
Il va de soi que personne, pas même Hitler, n'aime la guerre pour elle-même; chacun préfère la paix, de même que la santé, la richesse et le bonheur sentimental, entre autres.
Le texte semble suggérer que sans frontières, états et armées, il n'y aurait plus de violence à grande échelle. La "dépolitisation du monde" entraînerait, si l'on comprend bien, la paix dans le monde.
Au XIXe siècle, deux courants de pensée peuvent être considérés comme allant dans cette direction : L'anarchisme "pur et dur", ni Dieu ni maître, ni état, ni frontières, ni exploitation du reste. La question de savoir comment faire fonctionner dans la réalité une telle société, à plus forte raison si elle est mondiale, n'est pas abordée. L'homme, naturellement bon, trouvera les moyens de régler les conflits sans violence ni coercition. Il est inutile de rappeler qu'aucune société n'a jamais fonctionné selon ses principes.
La marxisme quant à lui relie nation et nationalisme à l'exploitation de l'homme par l'homme, et donc préconise à terme l'abandon de la notion d'Etat, supposée aussi nuisible que celle de nation.
Chacun sait ce qu'il en est advenu : Non seulement les états se réclamant du marxisme, à commencer par l'Union soviétique, ont vu le rôle de l'Etat se renforcer jusqu'à devenir le modèle du totalitarisme, mais encore nationalisme et marxisme institutionnel ont convergé, particulièrement en Asie. L'idéal internationaliste de K. Marx ne s'est donc concrétisé nulle part, bien au contraire.
Il reste comme "modèle moral universel" entre les nations (sans les abolir) le modèle kantien, qui correspond dans une large mesure au modèle de l'ONU, qui lui-même reprenait celui de la SDN de l'entre-deux guerres. Ce modèle prône la résolution des conflits par la négociation et la prévention, en considérant, non pas que l'homme est bon, mais qu'il existe des valeurs universelles auxquelles chacun peut, et doit (le fameux "impératif catégorique") se référer.
Ainsi, Kant, dans son projet de paix perpétuelle, n'abolit pas les nations, et ne préconise pas non plus une seule nation mondiale : Il importe que des gouvernements vertueux se mettent en place, qui trouveront entre eux les moyens d'éviter les conflits.
A travers ce très rapide survol de quelques moyens envisagés pour éviter les guerres, une remarque s'impose : Tous ces moyens sont de nature politique. Aucune "dépolitisation" n'est envisagée. L'anarchisme lui-même est un projet politique.
Devons-nous en conclure pour autant qu'il n'y pas de lien direct entre "le politique" en général et la guerre, ou plus généralement la violence à grande échelle ? Certainement pas, mais force est de constater qu'en ce XXIe siècle, la guerre, certes, n'a pas disparu ; mais elle recule, en tout cas par rapport aux grandes hécatombes du XXe siècle.
Dans ce long et complexe processus de diminution des grands conflits armés, qui peut nier que la politique internationale au sens le plus noble du mot ait joué le rôle principal ? L'aventurisme politique d'un Vladimir Poutine est activement combattu par l'action politique de la majeure partie de la communauté internationale - et on peut légitimement espérer que ce combat sera victorieux.
Ce ne sont pas les citoyens qui déclenche la guerre mais bien la personne élue, le chef d’état représentant ces citoyens, ces personnes, pourtant ce sont bien eux, ces citoyens qui vont aller se battre dan une guerre qu’ils n’ont pas déclenchés. Qu’ils aient élus ou non le chef d’état en place, les citoyens de ce même pays lui doivent obéissances, et vont donc aller défendre leur pays, qu’ils en aient l’envi ou non, ils obéissent aux ordres de leurs supérieurs.
Dans ce genre de cas les citoyens sont en quelque sorte déshumanisé, comme si le chef d’état était un joueur d’échec, qui se tient donc hors du plateau d’échec, et qu’il déplaçait à son bon vouloir ses pions, ses cavaliers…etc sur le plateau afin de mettre en échec et mat’ son adversaire, cette déshumanisation des combattants les transforme malgré eux en soldat. Cela peu sembler paradoxale, d’envoyer des citoyens combattre sans qu’ils en aient décidés, puisque l’on peut douter de leurs investissements et de leurs soifs de victoire. Cependant comme le décrit Georges Orwell dans l’extrait que vous avez sélectionné, cette déshumanisation des soldats peut être reconnus par les soldats ennemis, puisque ce n’est que le chef d’état qui déshumanise ses soldats en les envoyant se battre, cependant il est possible que cela soit la même chose dans le camp adverse, auquel cas cela serais pire d’un point de vus moral des dirigeants puisque une grande partie de ceux qui se battent et meurent au combat, se battrais et mourrait pour « rien ». Cependant cela peut aussi créer une sorte de compassion d’un camp à l’autre entre personnes qui ont été forcés de se battre, puisque dans l’extrait de Georges Orwell, celui qui tient le fusil pense reconnaitre en son ennemi, quelque chose qui montre qu’il n’est pas profondément fasciste, mais qu’il se bat pour son pays de gré ou de force, et que celui à qui on a collé une étiquette « d’ennemi » est tout comme Orwell un humain, et de surcroit peut être un humain qui n’a pas choisis de se battre pour la cause qu’il défend. Il y a dans ce cas là une réelle conscientisation des combats et une forte conscientisation de ce que c’est qu’être humain, ainsi que la reconnaissance de ses semblables. Cependant cette « réhumanisation » du soldat à eu lieu puisque ce dernier retenait son pantalon dans une acte profondément humain, ce qui à touché Orwell dans son état d’humain également, mais nous sommes en droit de nous demander, si ce soldat courrais de manière tout à fait normal, sans retenir son pantalon, si Orwell se serais abstenue de le viser également. Ou si son pantalon ne chutait pas et de fait que son allure soit une allure de course tout à fait normal, n’aurait pas eu l’effet contraire ? Orwell l’aurait-il alors considéré comme l’homme à abattre du fait qu’il ne se contente que de courir et que cela pourrait donner une impression de bon soldat, voulant accomplir sa mission du mieux possible, avec dévouement donnant par la même, une plus grande importance au message qu’il porte et tente de transmettre à un point B.
SCRIB
La guerre n’est pas me semble-t-il, une activité totalement extérieure à la nature humaine. Elle est une manifestation de la violence, un moyen d’assouvir une domination. L’homme ne refuse pas la guerre. Le combat fait partie même de son instinct. La paix est une construction qui est bien sûr légitime et vers laquelle il faut tendre mais qui n’est pas forcément quelque chose de plus naturelle que la violence.
Il suffit de regarder les cours de récréation d’écoles pour s’apercevoir de la violence avec laquelle certain assouvissent leurs dominations sur leurs camarades. Les cas d’harcèlements en sont un exemple flagrant. Néanmoins l’anecdote de George Orwell montre que quand on se bat pour une institution, pour une idéologie, on oublie bien souvent que ce sont contre des personnes qu’on se bat et une personne ne se dévoile pas dans ses idées ou dans ce qu’elle veut montrer mais bien dans ce que son attitude trahie, son naturel. C’est en reconnaissant le naturel le non réfléchi chez l’autre qu’on découvre aussi son humanité, celle-ci reflétant la nôtre.
Qui peut dire si Orwell a raison de ne pas tirer sur cet homme? Après tout,la fragilité qu’il montre en tenant son pantalon ne fait pas de lui un innocent. Peut-être le lendemain cet homme n’aurait pas hésité une seule seconde à appuyer sur la gâchette. Déterminer ce qui tient de l’idéologie et ce qui tient de la nature humaine me paraît être une tâche extrêmement ardue voire impossible. Il est indéniable que certains sont entrés en guerre pour une idéologie alors que jamais il n’aurait été capable d’un conflit avec un autre homme mais il est aussi indéniable que certains y voit un moyen d’assouvir leurs besoins de violence.
Vous dîtes que ce n’est ni un devoir moral ni la conscience religieuse qui l’a arrêté. Peut-être est-ce son éducation. Il n’est pas certain que l’homme soit bon naturellement. Le fait de se retenir de tuer un être qui nous paraît fragile n’est pas inné. Il suffit de voir le traitement que l’on réserve aux animaux,les chasseurs tuant «pour le sport» ou les afficionados de Corrida. Il est vrai que les animaux, même si nous avons fini par leur accorder des droits, ne nous sont pas semblables. Néanmoins il ne faut pas oublier les situations, par exemple de tabassages en règle, qui sont malheureusement monnaie courante, où certaines personnes s’acharnent sur d'autres justement car elles sont faibles, car elle ne représente pas de menaces et parce qu’elles sont faciles à écraser.
Ainsi, je ne suis malheureusement pas certain qu’un homme n’ayant pas reçu l’éducation d’Orwell, n’aurait pas tirer sans même une hésitation.
Il me semble qu’en s’abstenant de tirer, Georges Orwell agit en tant qu’homme de lettres, en tant que personne qui réfléchit avant d’agir et pas comme quelqu’un qui se laisserait guider totalement par son instinct.
S’il n’a pas tiré c’est parce que qu'il est Georges Orwell, et qu’il a vu ses propres faiblesses chez l’autre.
Ce qui a sauvé cet homme c’est l’éducation qu’Orwell a reçu avant l’endoctrinement, avant la propagande. C’est, me semble-t-il, l’éducation, celle que l’on dispense à l’enfant dès le plus jeune âge, qui permet de déterminer son rapport aux autres.
Je pense que cette histoire est néanmoins porteuse d’espoir, car, que l’homme soit «bon» par nature ou non, elle montre que l’éducation d’une personne lui permet de développer ce que l’on nomme communément :son «humanité», en fait son empathie, sa capacité à voir l’autre comme un semblable, et ceci de façon instinctive. Ainsi en éduquant les hommes à être proches des autres, en leur apprenant à les voir, même s’ils sont d’un autre pays, d’une autre culture, d’une autre religion, comme leurs semblables, alors nous pourrons garder un espoir que ces personnes ne verront plus de différence mais s’uniront et ainsi perdront tout intérêt de domination les uns sur les autres.
Le problème étant, bien entendu, que c’est en grande partie la politique qui détermine l’éducation et que sans un changement d’éducation, la politique ne peut changer.
la guerre est pour l'homme un moyen d'exprimer ses idées sa pensée, son mode de vie vis-à-vis d'une autre société humaine différente de lui, quand l'individus emploie la guerre c'est pour à la fois assouvir un besoin de domination de montrée que sa culture que son mode de vie et supérieur aux autre sans pour autant cherchant à comprendre les autre modes de vie, on peut prendre par exemple l'empire romain qui avait pour but d'annexer des territoires étranger, après cette prise de pouvoir sur l'autre au lieu d'esclavagé le perdant il le laissé vivre et de plus est-il le faisait intégrée la société romaine certes pas forcément comme un citoyen romain, mais jouissais de droit qui lui était propre et pouvait même finir par prétendre à devenir citoyen romains, ceux qui faisais de lui un individus ayant adopter pleinement un nouveau mode de vie alors que cela aurais pu simplement lui causé la mort si la guerre était simplement une question de supériorité physique. Cela montre que la guerre est une question de politique et aussi une manière de rayonné à travers le monde comme étant une société moderne par son mode de vie qui est adopter par une majorité de culture différente même si cela est fait par a force.
En quoi la guerre est un outil d'expression qui se veut inutile à nos jours ?
la guerre est un acte de grande violence ou la vie humaine perd tout importance, un homme n'est plus un à partir du moment qu'il est en habit militaire car cette habit le dépouille de toutes son individualité il n'est plus que l'outil des gouvernement et de la société qui l'utiliseront pour exprimer sa force, sa grandeur si on peut dire et de cette façon la société accepte le sacrifice de milliers de vie au nom d'un concept, d'une idéologie ou d'un mode de vie qui se voudras plus important que la vie de ses propres utilisateur, on peut prendre l'exemple de la guerre en Ukraine, cette guerre est faite non par besoin économique, sociale ou humaine mais par envie de redonné le symbole de sa grandeur impérialiste à la Russie par le biais de sa puissance militaire qui est censé faire telle la deuxième plus grande puissance mondiale militairement face à l'Ukraine qui est vingt-deuxième du classement mondiale. Et pourtant malgré cette puissance militaire cette tentative de prouvé au monde sa grandeur seras un échec puisque La Russie fit mise en difficulté militairement par un pays qui n'avait aucune chance de résister face à une telle puissance militaire. Ceci montre parfaitement de nos jours l'inutilité de la guerre pour montrer sa grandeur face au reste du monde de la nation, en plus de tuer et de détruire l'individualisme des soldats de cette guerre et des autres acteurs de celle-ci tel que les civils.
Ainsi on peut comprendre que la guerre ne devrait plus avoir lieu d'être puisqu'elle est devenue obsolète pour cette époque ou les armes de destruction massive existe et qui si utiliser mettra fin à la civilisation humaine, nous vivons dans une époque où la guerre est une guerre psychologique et non physique par le fait qu'elle est automatisé et que l'humain n'est rien de plus que de la chair à canon qui ne devrait jamais être utilisé ainsi.
Chopin Aurélien
M1 philosophie EAD Reims
Pour Rousseau, « la guerre n’est point une relation d’homme à homme, mais une relation d’État à État, dans laquelle les particuliers ne sont ennemis qu’accidentellement, non point comme hommes, ni même comme citoyens, mais comme soldats ; non point comme membres de la patrie, mais comme ses défenseurs. ». Il est vrai que même si ce sont les soldats qui vont à la guerre, ce ne sont pas eux qui font la guerre, du moins pas au sens littéral. Ce ne sont pas eux qui vont déterminer les stratégies de guerre. Ils ne sont qu’un moyen de parvenir aux fins, aux ambitions des États, ou des nations, qui ont déclenché la guerre.
La plupart des soldats qui partent en guerre ne font pas la guerre parce qu’ils partagent profondément les convictions et les raisons pour lesquelles leur pays est en guerre, mais parce qu’ils sont simplement envoyés à la guerre, ils en sont contraints (particulièrement à l’époque). Leur opinion politique sur la situation n’est en aucun cas un frein pour les États, et ne devrait même pas en être un pour eux-mêmes. Ils doivent juste comprendre quel est leur ordre de mission et l’exécuter (ce qui est relativement simple: tuer l’ennemi).
Comme vous le soulignez dans votre publication, un soldat est en fait un individu qu’on a d’abord dépouillé de sa singularité unique et du sens de l’humanité commune pour ensuite le transformer politiquement en une machine destinée à combattre et à détruire l’ « ennemi ».
Dans son traité de stratégie militaire « L’Art de la Guerre », le général de guerre Sun Zi illustre parfaitement cette problématique. Il dit que pour planifier une guerre, on doit comprendre fondamentalement la pertinence de cinq facteurs décisifs, dont le premier est ce qu’il appelle le « sens moral », l’influence morale. Il affirme ainsi: « Le Sens moral met le peuple en harmonie avec son souverain, de sorte qu’il le suivra sans crainte dans la vie comme dans la mort. ». Les soldats pensent alors, inconsciemment, s’engager politiquement dans leur guerre parce qu’ils suivent le « sens moral » dont leur souverain (ou leur pays) a fait l’éloge. La guerre est soumise à la politique, et pourtant ils n’ont pas besoin de se positionner, d’avoir une opinion politique: ils ont juste besoin de suivre les ordres. En somme, la guerre retire à l’Homme ce qui fait de lui un Homme: sa conscience. Les soldats n’ont pas besoin d’avoir une conscience pour suivre les ordres et tuer. D’ailleurs, l’idéal serait même qu’ils n’en aient pas, si l’on suit la « logique » de la guerre. Les meilleurs soldats sont ceux qui ne cherchent pas à savoir si politiquement leur pays a raison de faire la guerre ou non, et ceux qui s’abstiennent de toute moralité. Si Orwell avait aveuglément suivi les ordres, sans se soucier de ce que sa conscience disait, il aurait tiré sur cet homme.
On déshumanise un homme pour en faire une arme, tel est le principe même de la guerre.
La question de la déshumanisation organisée au niveau étatique à l'occasion des guerres est particulièrement bien résumée dans cet article, et cette "anecdote" tout sauf anecdotique de George Orwell est bouleversante puisqu'elle illustre cette distance terrible qui peut exister entre deux hommes en temps de guerre, des hommes devenus des uniformes et débarrassés de toute personnalité ou singularité . Stefan Zweig en parle également en décrivant ses difficultés à son arrivée en Angleterre : même après avoir perdu sa nationalité autrichienne, et avoir été contraint à la fuite de son pays par l'idéologie nazie, la propagande de guerre avait tellement imprégné l'esprit du temps qu'il mit du temps à se défaire d'un statut latent d' "ennemi". Quatre-vingts années après son émouvant testament livré dans Le Monde d'hier à la veille de son suicide, qu'en est-il de l'universalisation des idées ardemment espérée par Zweig? Parvient elle à lutter contre la nuit de la guerre ? Peut-on encore espérer un progrès de l'humanisation globale du monde ?
Tout d'abord, il faut noter que l'utilisation grandissante des armes de longue et très longue portée ne peut qu'accentuer le phénomène de déshumanisation des différents acteurs d'une guerre : il est de moins en moins question de tirer sur un homme à demi-nu à cent mètres, et de plus en plus de programmer des envois de missiles au plusieurs milliers de kilomètres, sur des cibles qui ne sont plus que des coordonnées GPS.
On trouve bien sûr dans l'unique utilisation de la bombe nucléaire un exemple effroyable de la mise en œuvre de techniques de guerre ayant un potentiel d'anéantissement qui est doublement difficile à concevoir : d'abord, comment prendre conscience d'un tel nombre ? Et deuxièmement, il s'agit de tuer un nombre immense en un geste, en une décision : la même décision aurait elle été prise s'il s'était agi d'exécuter un par un des dizaines de milliers de civils en une journée ? On ose supposer que non. Depuis 1945, l'utilisation de l'arme atomique est d'ailleurs considérée comme une limite infranchissable, un point de non retour dans l'horreur et l'irresponsabilité. Devenue arme de dissuasion, elle n'en reste pas moins une arme qui existe et qui est à la portée de bon nombre de gouvernements, et on ne peut qu'espérer que ceux-ci aient au moment de la prise de décision une petite pensée pour les centaines de milliers de petits hommes retenant leurs pantalons qui risquent d'être anéantis.
Cependant, cette technicisation du monde a également quelques conséquences positives : la guerre ouverte devient une sorte de dernier recours à l'ère de la mondialisation, et elle est retardée autant que possible par une guerre d'une autre sorte, guerre d'influences entre puissances faisant peser dans la balance toutes sortes de sanctions politiques, économiques et financières dont l'impact est supposé se substituer à celui d'une lutte armée.
Il n'est donc plus question dans notre siècle de trêve au milieu du "no man's land" sur le front le soir de Noël. Il semblerait que la guerre moderne soit de plus en plus encline à effacer et à mettre à distance l'humain et les éventuelles victimes humaines dans la prise de décision une fois déclarée. En revanche on constate également qu'elle arrive plus tard, et que l'entrée en guerre des puissances démocratiques soit souvent troquée contre une prise de position d'une autre sorte, ne mettant pas directement en jeu des forces humaines. La question qui se pose alors est la suivante : éviter la mise en œuvre de moyens plus directs pour s'opposer matériellement à l'avancée d'un pays agresseur dans un autre est-il suffisant?
Ça a commencé par de petits malentendus après lesquels il m'a dit que ce serait bien de faire une pause, qui je pense s'est transformée en rupture. Il ne me cherche plus. Cela me rendait triste parce que nous étions ensemble depuis le lycée et qu'il était mon premier et unique amour. J'ai cherché de l'aide partout sur Internet, puis j'ai vu tant de personnes publier des témoignages sur le Dr DAWN, j'ai eu son contact via l'un des commentaires et j'ai parlé avec lui de ma situation et il a expliqué le processus de réconciliation et comment il va m'aider se réconcilier avec lui en trois jours. Cela fait exactement 3 mois que je l'ai contacté maintenant et tout était parfait et je devais poster ceci car il mérite tous les bons mots pour m'aider.
Il est WhatsApp : +2349046229159
Courriel : dawnacuna314@gmail.com
Monsieur, si ce n'est pas déjà fait, je vous encourage à lire le poignant texte de Cora Diamond, "L'importance d'être humain", plus particulièrement le Chapitre 2 "Le cas du soldat nu". Diamond nous propose une nouvelle lecture du cas du Soldat nu de Michael Walzer. Je trouve très marquant le récit de Robert Graves qui donne son titre au paragraphes du "Soldats nus" :
"Tandis que posté sur une colline dans la tranchée de soutien, je pointais mon fusil par une meurtrière dissimulée, je vis un allemand, à 700 yards environ, dans mon viseur télescopique. Il prenait un bain dans la troisième ligne allemande. L'idée de tuer un homme nu me déplaisait, et je tendis le fusil au sergent qui était avec moi. "Tenez vous êtes meilleur tireur que moi". Il l'eut - mais je ne suis pas resté pour assister au spectacle"
Une première lecture laisse penser que chez le soldat, derrière le discours politique d'une haine viscérale de l'ennemi, se trouve un homme reconnaissant chez l'ennemi qu'il doit abattre comme un "semblable". Dans la guerre, le meurtre d'autrui n'est justifié, n'est souhaitable que tant que demeure l'image informe, factionnaire, incomplète, de l'autre pour lui enlever toute humanité, toute ressemblance, toute valeur de vie. Dans le cas du soldat nu est justement raviver cette conscience que l'ennemi est un homme comme nous, un être possède un "droit à la vie", qui normalement n'est dû qu'au non-combattant.
Comme vous l'avez fait remarquer, les termes utilisés par George Orwell dans la cas du soldat défroqué ne transparaissent pas de la rigueur de la moralité. Le fait de "n'avoir pas envie" ne démontre pas d'une reconnaissance d'une immoralité à tuer le soldat nu. Cela se remarque également dans le récit de Robert Graves à qui cela "déplaisait" de tuer un soldat nu. Dans ces deux cas, la question de la moralité dans la guerre, du droit à la vie ne transparaît pas dans leurs discours. En effet, si Robert Graves reconnaissait à droit à la vie au soldat nu, il ne ferait que refuser de tuer lui-même cette homme sous couvert que cela lui "déplait", mais refuserait également qu'un autre soldat, que son sergent, que toute autre personne ne tue cette homme qui aurait retrouvé son humanité, sa fragilité, son "droit à ne subir d'agression" que possèderait le non-combattant. Ce que transparaît le discours de George Orwell et de Robert Graves n'est pas une réflexion sur la moralité de l'acte dans la guerre, mais plutôt la façon dont est admise la fonction du soldat dans la guerre. Cela soutient une pensée que le soldat s'accorderait à ne pas ébranler l'humanité qu'on partage avec les hommes dans un conflit armé.
Ainsi, cela transparaît dans le sentiment douloureux et le refus de tuer le soldat nu mais également à travers le refus de l'usage de la barbarie et du discours de la haine de l'ennemi. Nous pouvons soutenir cette idée à le chant militaire. En effet, les chants les plus populaires s'incarne dans le désir de "rentrer chez soi", de ne pas faire la guerre. La haine instituée par les nations à l'origine du conflit et la propagande de guerre montre de manière criarde la dissonance entre le discours public, celui de l'État et celui de l'individu soldat qui compose l'armée. Ce refus de la barbarie et de la haine de l'ennemi transparaît également dans l'exemple du capitaine Thomas refusant d'user du gaz toxique, malgré le fait que les Allemands en avaient fait usage les premiers. Il trouvait que c'était condamnable et que ce n'était pas "servir en soldat qu'utiliser des machines comme ça".
Finalement, la distinction que j'essaye de faire ici, et que tente de faire Cora Diamonds dans son livre, ne cherche pas à invalider le discours de Michael Walzer mais à présenter une façon de voir les cas de soldat nu qui diffère de la sienne.
La question de la guerre et des atrocités que peuvent commettre des soldats, pourtant tous des hommes, est vraiment particulière.
Rousseau explique que deux tendances sont inscrites dans la nature humaine : l'amour de soi et la pitié. L'amour de soi pousse chaque existant à rechercher ce qui le conserve et épanouit son existence; la pitié modère son affirmation en lui inspirant une répugnance innée à voir souffrir autrui. En ce sens, le cas de Georges Orwell et du soldat nu, est comme le surgissement de cette tendance humaine qu'est la pitié. Mais Orwell n'est pas un cas universel et très fréquent dans le contexte de la guerre; certains hommes devenus soldats ne s'arrêtent pas à la pitié, ne s'arrêtent pas aux autres hommes face à eux, ils tuent ce qui est "ennemi".
Comment parviennent ils donc à dépasser cette tendance humaine, pourtant essentielle selon Rousseau ?
En réalité le problème n'est pas les capacités de l'homme devenu soldat à dépasser cette tendance, mais ce qui a permis à l'homme de dépasser celle ci. Et celui qui est parvenu à formater cet homme, c'est bien l'Etat. Rousseau le dit bien : la guerre n'est pas une relation d'homme à homme mais d'Etat à Etat.
Mais poser l'Etat comme responsable de tant d'atrocités, n'est-ce pas paradoxal ? Car pourquoi l'Etat a été créé ? Nous pouvons dire selon un certain point de vue que l'Etat a été créé en vu du Bien de la société et de la communauté des hommes. C'est parce qu'il y a un Etat que nous sommes protégés, défendus, que nous progressons tous vers un Bien commun, dans un cadre précis et réglementé. Mais finalement c'est parce qu'il y a eu un Etat, qu'il y a eu des frontières et que nous avons considérés l'au-delà de cette frontière comme "dangereux". C'est parce qu'il y a des Etats qu'il y a eu des conflits sur les ressources ou autres. C'est parce qu'il y a des Etats que nous ne sommes plus des "hommes" mais des français, des chinois, des anglais, des américains...
L'Etat n'a amené qu'une division globale dans un climat tendu perpétuel. L'Etat n'a fait que répondre a un besoin de pouvoir de certains et finalement nous en payons le prix.
Réfléchissez bien à l'entièreté de l'histoire humaine : Pourquoi les hommes s'entre-tuent -ils ? L'Etat a alimenté cette violence, cette hostilité en vertu d'une soi-disant protection ou d'un certain "droit". L'Etat a donné naissance aux soldats, l'Etat a donné le pouvoir aux hommes d'être soldats.
Ce n'est donc pas sur l'homme et ses tendances qu'il faut se pencher, mais sur la légitimité de l'existence de l'Etat et ses prétendus bienfaits pour les hommes.
La « rhétorique » de la guerre, cette façon dont l’humain convainc l’humain de se battre, souvent pour ce qu’il ne veut pas, pour survivre, ou suivre une idéologie portant atteinte à celle des autres. Les conflits en les êtres humains ne sont plus à démontrer : ils sont là et, lorsque la puissance est à sa portée, ils sont destructeurs. Plongé un peuple dans la guerre, n’est pas souvent de l’ordre de son choix, car même lorsqu’il s’agit de se défendre, il s’agit de survivre face à une menace qui n’était pas choisie. Lorsque l’on oublie la face humaine de l’ennemi, tout comme lorsque l’on oublie la nôtre, l’on oublie toute la vie qu’il y a derrière : ne pas mourir pour survivre, pour défendre sa famille, ou son pays, revient à tuer celui qui, en face, vie selon les mêmes circonstances. L’Homme est peut-être de nature belliqueuse, mais qui peut dire si un nourrisson naît dans l’optique de conquérir dans d’autres pays, de massacrer d’autres semblables. Accepter la guerre, est bien souvent rentrer dans cet état de persuasion qui légitime son identité à la nôtre, mais ne reconnaître les conflits que par ce prisme revient à cette attitude fatalisme où il vaut mieux plier qu’espérer autre chose. Pourtant, face à l’autre, même lorsqu’il est ennemi, Orwell nous montre que, lorsqu’il retrouve son humanité, lorsqu’ennemi quitte son costume d’ennemi de guerre, et lui de soldat, il lui devient bien plus difficile d’attenter à sa vie. Pourtant, nous pouvons observer également, dans la vie de tous les jours, cette tendance dominatrice, face à laquelle l’on ne retrouve que de l’indifférence. Difficile alors de croire que cela ne fait pas partie de notre « nature » : pourtant l’encadrement qu’il nous faut pour en arriver aux horreurs que nous commettons, existe bel et bien. Je ne suis pas convaincu que la guerre soit le nerf de notre humanité, puisque tuer un humain ne sera jamais la même chose que tuer un ennemi décrit comme un démon envahisseur, sauf s’il devient ainsi. De même, dépouiller chaque individu de toute humanité, pour les oublier dans le cercle de la violence, et l’alimenter à nouveau, sans comprendre que chacun possédait une vie et des attaches qui sont exactement les mêmes qui, semblerait-il, nous pousseraient à agir de cette façon, revient à être obliger de porter des œillères : et oublier toutes les autres fois où nous avons éprouvé de l’empathie pour l’autre, et l’avons oubliée. La guerre est peut-être inévitable, mais notre dégout pour elle aussi, alors certainement qu’elle n’est pas si naturelle que nous le prétendons.
La déshumanisation de l'adversaire et la transformation d’un individu en simple soldat renvoient aux idées de Hannah Arendt sur la banalité du mal. En 1963, dans son œuvre Eichmann à Jérusalem, elle montre que certains peuvent faire des monstruosités sans pour autant vouloir le mal comme finalité, cela peut consister en une obéissance aux ordres, sans remettre ceux-ci en question, et alors au renoncement moral de leurs responsabilités. L'anecdote à propos de Georges Orwell fait écho à la philosophie d'Emmanuel Levinas. Dans son œuvre Totalité et Infini en 1961, ce dernier met l'accent sur l'importance du visage d’autrui comme source d'une responsabilité. L'épiphanie d'Orwell illustre bien cette éthique, puisque face à la vulnérabilité de son adversaire, il ne peut se résoudre à tirer.
La dépolitisation du monde permettrait de dépasser les clivages politiques et d’embrasser l’humanité. Cette idée rejoint les réflexions d'Immanuel Kant à propos de la paix possible si les nations adoptent des principes universels de droit, respectent la souveraineté des autres États et forment une fédération internationale. Cette perspective kantienne de la paix met l'accent sur la nécessité de dépasser les divisions politiques et nationales pour encourager la coopération et la reconnaissance mutuelle.
“ l’homme a en lui un besoin de haine et de destruction” dit Albert Einstein dans une lettre adressée à Freud en 1932, des correspondances rassemblées dans un livre intitulé “Pourquoi la guerre ?”
Certes, ce ne sont pas les citoyens qui prennent la décision de déclencher la guerre, car ils n’ont pas le monopole de la violence légitime, mais ces citoyens sont en quelques sortes _ par des moyens idéologiques, identitaires, propagandistes, nationalistes_ poussés à faire partie de la guerre déclenchée par l’état. Tout au long de l’histoire de guerre et des conflits, la propagande de “ la guerre juste ” était présente, il fallait préparer l’inconscient collectif à accepter la réalité nauséabonde de la guerre. Le concept de “la guerre juste” Michael Walzer le définit de la manière suivante : “ Les guerres justes, sont des guerres limitées, menées conformément à un ensemble de règles destinées à éliminer, autant qu’il se peut, l’usage de la violence et de la contrainte à l’encontre des populations non-combattantes ”
Sur la lumière du droit international contemporain, issu des chartes des Nations-Unies, la guerre est absolument condamnée et elle est dénoncée comme un fléau, car le nouvel ordre international cherche la paix et la sécurité, une guerre c’est le dernier moyen lorsque toutes les tentatives de l’éviter ont échouées et lorsque les voies pacifiques sont épuisées. Kant notait qu’il ne faut pas mener une guerre en rendant la paix impossible, dans cette notion de la guerre juste, utilisé généralement par les chefs militaires afin de rendre crédible leur opération. Poutine le chef du Kremlin, a présenté son intervention militaire en Ukraine, comme une opération militaire juste de dénazification qui vise à venir en aide aux zones habitées par les Russes et les pro-russes.
La dépolitisation désigne la fin de l’engagement, le repli individualiste, le de dépossession de l’engagement individuel et collectif, elle semble être un rêve utopique loin d’être réalisé dans un monde gouverné par les lois du marché (le capitalisme) et le marché des armes (l’industrie de la guerre), la dépolitisation signifie la fin de la politique ou l’homme n’aurait pas à gérer des conflits bilatéraux et géopolitiques avec ses voisins, car la raison fera défaut, par contre ce que nous constatons qu’une dépolitisation révolutionnaire des individus contre les guerres, ça deviendra une devise courante, et un devoir morale qui prime sur tout intérêt de la guerre.
Le philosophe italien Roberto Esposito voit dans la dépolitisation “ la forme achevée de la modernité” certains intellectuels voient dans la dépolitisation la fin de l’homme, une dépolitisation des citoyens dans la société mène à une dévalorisation de l’engagement dans le mouvement et le progrès social, la dépolitisation ce n’est pas un processus uniforme, mais multiforme, car il est accompagné d’autres processus (désidéologisation, départisanisation, déconflictualisation) des questions collectives, il s’agit aussi de questionner l’existence de frontière (et le garde-frontière) entre le politique et le non politique et de penser leurs relations en termes de dynamiques, la politisation et la dépolitisation apparaissent comme le résultat du travail simultané et concurrentiel de groupes d’acteurs, les uns ayant intérêt à inscrire une question dans les registres et dans les formes du politique, les autres à empêcher ce processus ou à lui attribuer des qualités distinctes.
Rachid El aalem
M1 philosophie EAD Reims
Enregistrer un commentaire