Un des aspects les plus tragiques de cette agression, c'est qu'elle marque, à contre-courant de l'histoire, une résurgence du passé dans un monde confronté à des défis – et le plus urgent de tous est l'urgence climatique – qui exige des formes (morales, juridiques, politiques) d'inventivité et de résolution totalement nouvelles. Manifestement passéiste et anachronique est le projet de restaurer la grandeur, largement imaginaire, de la Russie impériale, comme une vengeance abolissant par la violence les affronts et les humiliations subies dans l'histoire récente. Face à ces troupes qui saccagent les villes et sèment la mort sur leur passage, nous pouvons bel et bien dire : Ah nous en sommes donc encore là ! Rien de nouveau alors sous le soleil ! répétant l'ancienne formule de la sagesse de Salomon : Vanité des vanités ! Bien que nous ayions affaire à une effraction dans le présent qui dépasse toute conjecture, nous pouvons néanmoins penser cette entreprise meurtrière à partir de schèmes intellectuels constitués et qui remontent à Thucydide, à Machiavel ou à Hobbes ; de même sommes-nous autorisés à juger et à condamner cette agression selon des catégories morales et juridiques qui sont entrées depuis longtemps dans nos traités et dans nos documents juridiques. Le réalisme politique dira ce que ces luttes pour la souveraineté et la domination sont consubtantielles aux Etats-nations, et que la morale s'épuise en vain à dénoncer l'absence de conscience et de restriction dont ils font preuve lorsqu'ils ont recours à la guerre et qu'ils le peuvent. Seulement voilà, les défis existentiels auxquels sont confrontés les hommes et les femmes d'aujour'hui, et plus encore les générations futures, adressent leur urgence à la communauté humaine, bien au-delà de ses constructions étatiques et des logiques de puissance auxquelles celles-ci ne cessent pas et n'ont jamais cessé d'obéir.
Le peuple d'Ukraine, et c'est atroce et insupportable, est sacrifié sur l'autel de rationalités – gardons-nous d'y voir un geste de folie - qui résurgissent comme les démons politiques du passé, nous détournant des mesures révolutionnaires qui devraient être prises dans le cadre d'un état d'urgence écologique mondial. Nous habitons un monde commun dont les conditions de vie sont menacées et détruites d'une manière qui est partiellement déjà irréversible. Ce n'est pas le moindre des crimes de l'agresseur que de détourner notre attention de cette réalité, au nom d'une vision d'ores et déjà obsolète de l'histoire humaine . Il faut pourtant lier les deux : les conditions sociales et politiques de socialité, de justice et de paix communes ne sauraient être séparées des conditions eco-systémiques d'habitabilité de la Terre. Si l'on ne peut encore tout à fait se débarrasser des Etats-nations avec leurs frontières et leur logique de puissance, le nouveau cadre, et qui impose de nouvelles institutions, est celui de la communauté humaine globale, unie et pacifiée (non sans conflit) dans la quête de justice et la préservation de son habitat.
10 commentaires:
Rares sont ceux qui peuvent saisir le mouvement en marche sans se tromper. Hegel, le philosophe de la "Raison dans l'Histoire", ne se trompait-il pas lui-même en voyant dans Napoléon une matérialisation de "l'Esprit en marche" ? Ou bien faisait-il volontairement l'impasse sur les morts massives que les guerres napoléoniennes entraînaient sur le sol Européen (estimées à deux millions) en préférant y voir le progrès : un empire "libérant les peuples" des monarchies traditionnelles ? Francis Fukuyama annonçait la "Fin de l'Histoire", avec la victoire de la démocratie dans le monde au moment où la guerre froide semblait s'achever après la dislocation de l'URSS. Les "Cassandre" ont souvent tort et les grands optimistes tout autant.
Quelle lecture privilégier ? On peut voir dans le monde une succession d'événements engendrés par le "hasard et la nécessité" (Théodore Monod), ou bien la source d'une volonté aveugle (A Schopenhauer) ou de puissance (F. Nieztsche), y préférer une perspective théologique (le retour du Christ sur Terre précédée de l'Apocalypse pour les chrétiens), ou encore n'y percevoir que le jeu de rapport de forces entre "infrastructure" et "superstructure" (K Marx)... L'histoire est en fait sans cesse réinterprétée suivant la perspective que l'on emploie pour la juger.
La "Chouette de Minerve s'éveille toujours à minuit". Nous connaitrons la fin de l'histoire lorsque l'histoire sera passée, nous y découvrirons la « ruse » qui y était cachée. Peut-être un jour les hommes verront-ils le conflit russo-ukrainien comme celui qui aura permis de faire naître une "conscience mondiale" ?
Le moyen le plus simple et le plus rapide pour créer un sentiment d'unité entre les hommes est probablement de se trouver un ennemi commun. Lorsque la quasi totalité du monde désavoue l'Etat russe et apporte son soutien logistique, financier et militaire à l'Ukraine, cela peut sembler bien faible en regard de la poursuite des bombardements et du décompte meurtrier… Pourtant, peut-être l'humanité est-elle en train de passer un cap pour s'unifier, y compris au travers du peuple russe qu'il ne faudrait pas confondre avec l'Etat russe.
Si cette guerre permet de fédérer le peuple humain, si des personnes visionnaires décident de reconstruire la paix entre la Russie et le reste du monde, alors peut-être serons-nous mieux armés pour nous défendre contre notre véritable ennemi du moment : le réchauffement climatique et ses conséquences (les nouvelles épidémies, les famines et le manque d'eau à venir, les déplacements de population).
Pour cela, deux changements devront selon nous se produire : d'abord la construction d'une opinion publique mondiale; elle est en train de naître sous nos yeux (la 1ère grève mondiale pour le climat ayant réuni des centaines de milliers de personnes en 2019 marque un jalon, l'aide à l'Ukraine peut-être un deuxième); ensuite une révolution "copernicienne" telle que nous n'en avons pas connu depuis la fin de la préhistoire.
Notre survie passe par l'abandon de la conscience de l'importance de soi au profit de la conscience de l'importance de la vie, au-delà de notre seule existence. Pour l'écrire autrement : l'abandon de "l'ego", tel que le recherchent la plupart des spiritualités authentiques, au-delà des dogmes, est la deuxième condition. Ce changement est encore plus lent et improbable que le premier. Pourtant, il est à notre portée, il ne requiert pas de grandes actions, mais d'abord de regarder en soi. Nous sommes notre principal ennemi et notre principale voie de salut.
Cette guère trouve « ses justifications » dans le passé alors que le monde entier est confronté au problème du climat, qui est un problème commun à tous, donc d’ordre mondial. Alors que nous cherchons des solutions nouvelles pour contrer un « danger nouveau », nous voici replongé dans les maux du passé, qui resurgissent de l’histoire. Une histoire de vengeance, une histoire que l’on pensait derrière nous. On se retrouve au vus des images et des informations qui arrivent jusqu’à nous dans un temps qui nous paraissait ancien, et révolus, nous pensions être à l’abri de ce genre « d’évènements », où des gens meurent, des gens fuit, des gens ont peur, sont affamés, forcé de constater que nous n’avons pas appris de nos erreurs et que l’histoire peut alors se répéter, de plus nous ne saisissons pas bien où se situe les enjeux d’aujourd’hui, quelles sont donc nos priorités !?
La morale et la justice peuvent-elle vraiment interférer dans ce conflit ? Ont-elles encore un sens au sein de ce conflit qui semble nier ou écarter ces deux notions. Car ici ce sont les démons du passé qui resurgissent pour évincer les démons actuels qui pèsent sur notre futur, cependant le problème climatique, sera mis au second plan, en théorie, mais la progression du dérèglement climatique ne sera pas mise en pause, elle continuera de progresser, de s’accentuer.
Les conditions de vies de l’ensemble des espèces vivantes sont menacées, et au lieu de tenter de réparer les erreurs qui ont causés le dérèglement climatique, ou de les apaiser, de les réduire, l’homme qui est la source de ces mêmes erreurs continue à s’entretuer, en détruisant par la même des écosystèmes qui avais déjà des difficultés à survire au temps qui passe et à l’empreinte laissé par l’Homme. Afin de trouver un remède au problème écologique ou au moins à empêcher que le problème ne croie, il faudrait déjà qu’il y ai une entente général entre tout les hommes pour comprendre que leur priorité est le problème écologique. Car c’est en se concentrant sur les problème du passé, en voulant les venger ou les « résoudre » selon le point de vue duquel on se place, que l’on n’avance pas, et le fait que la Russie envahisse l’Ukraine montre que la Russie n’a pas compris où se situait l’enjeu principal de notre présent et de notre futur, car même en excluant la morale ou la justice de ce genre de combat, on ne peu que se demander à quoi bon tenter de se venger du passé, quand notre futur proche est déjà menacé, car même si le passé est « venger » cela n’empêchera pas le danger futur de se réaliser. Il faut comprendre les erreurs du passé, non pas pour corriger le passé, qui est déjà gravé dans le marbre, (c’est un fait, le passé s’est passé, les événements qui le constituent se sont déjà déroulés), mais pour corriger le présent, afin que le futur n’ai pas à se soucier de cela, car d’autres problématique arriverons peut-être, et même surement, mais les problèmes du passé qu’ils soient bon ou mauvais ou pas de les régler, juste ou injuste, ne se règlent pas en faisant un bon dans le passé, mais en ne les réitérant pas dans le présent et le futur, pour pouvoir alors se concentrer sur le danger qui menace notre présent et notre futur. Menace réelle qui, si elle est trop sous-estimée ne fera que se rapprocher de nous, réduisant considérablement notre vision du futur, jusqu’à même franchir un point de non-retour, dont nous sommes déjà si proche…
SCRIB
la terre tremble, le ciel gronde telle un orage, le sifflement des obus annonce la fin d'un songe que les peuples d'Europe pensée disparue dans les méandres du passée là ou seule des carcasses de béton et des sépulture honorifique d'un souvenir lointain preuve de l'existence d'une telle réalité, qui est la guerre mais pas n'importe quel guerre, celle qui marqua à jamais l'Europe et le monde bien des décennie du par sa violence et ses horreurs remontant en cause les principes même de la morale humaine, cette guerre qui se déroula il y presque moins d'un siècle et maintenant de retour comme un écho du passé de l'homme venus le chercher et le sortir de ses résolutions qu'il avait entamer pour créer un avenir meilleur pour ses descendant en recherchant des solutions au problème du présent et à ceux du futur, des problèmes qui ne peut plus être remis à plus tard puisqu'il en va de l'avenir du monde et de ses habitant. Cependant, malgré cette volonté de changer, de s'améliorer l'homme est rattraper par son passé, par son orgueil par sa volonté d'être meilleur que son prochain, de ce nationalisme que l'on peut considérer comme toxique vue qu'il ne fait que générée conflits et discorde dans les sociétés humaines. Ce conflit qui sévie en Ukraine, qui est une violence comme on en avait plus vue depuis plusieurs décennie n'est pas apparue comme ça elle est née d'une rancœur de plusieurs hommes ayant vécue la puissance militaire de la Russie décliné comme un échec, comme une faiblesse et une humiliation, dont le seule objectif seras de rentre à ce pays sa grandeur impériale passée quitte a sacrifié le bien-être et la vie de son propre peuple, qui jamais ne renaitra par le simple fait que le passé reste le passé et ne peut être modifier dans le présent mais simplement reproduit telle une mauvaise imitation d'une œuvre d'art, ses hommes arrivée au crépuscule de leurs existence conscient que leurs effort n'aboutiront jamais de leur vivant tente par un dernier élan orgueil quitte a embrassé le monde mettre à bien leur projet de leur vivant, un dernier élan de vie qui ne sera que futilité mais qui aura des conséquence terrible sur le monde et l'Europe qui se croyait en sécurité fasse à une violence passé pensant que jamais cela ne pouvait se reproduire puisque les leçon avait été apprisse mais malheureusement cela ne fût pas le cas pour tous ainsi l'Ukraine de par cette erreur et condamné à bruler et son peuple à souffrir par les erreurs d'autrui.
Les priorités de l'Europe son t'a revoir au jours d'aujourd'hui, comment pouvons-nous assuré un avenir aux génération suivante quand aujourd'hui les problèmes des générations passée n'ont pas était résolue ? et comment pouvons-nous régler ses problèmes passés sans que ces derniers ne sont un impact sur les générations suivantes ? Et finalement comment allons-nous répondre aux problèmes de l'environnement alors que nous avons était incapable de régler les problèmes passés? …
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Au premier apport il y a nécessité de sauver notre environnement et les espèces qui l'habite, cela est indiscutable pour la pérennité du monde et des êtres vivant tel que nous le connaissons, cette réponse à ce problème mondiale doit tout aussi être fait de manière morale c'est-à-dire que l'homme ne doit pas employer des moyens radicaux qui mettrait à mal l'individus, l'homme ne doit pas se mettre à sacrifier une minorité pour préserver la majorité chose qu'il y a déjà fait par le passé et cela à engendrer des problèmes sociaux dans le présent que nous connaissons, les actions qu'ils doivent mené doit être efficace sans pour autant impacté de manière négatif la vie des individus futurs, il est moralement inacceptable de créer ce que l'on pourrait appeler un Eden " un paradis" dans la vie présente de par nos actions égoïstes pour au finale que cette Eden ce transforme en enfer pour les générations suivantes.
Néanmoins, il est tout aussi important de répondre de la meilleur des manières au problèmes que l'Europe fait face aujourd'hui et qui est un problème qui resurgit du passée européen, qui doit être une réponse face à la violence d'une nation a eu notre en tant que nous acteur et spectateur de ce conflit, cette réponse doit-être réfléchie dans le sens que les action mené par la nation agresseur est le résultat de choix politique interne de ce pays mais pas forcément un choix totalement collective de la population de cette nation mais au contraire un choix pris par une minorité, et la réponse de l'Europe doit prendre en considération cette réalité pour éviter de rebasculer avec une maltraitance d'une partie de la population de l'Europe qui n'est guère responsable de ces actions mené a contrario il faut pour autant donné une réponse qui soit légitime vis-à-vis de tous les morts civils et innocents que ceux court conflit a déjà générer et des horreurs qui rappelle ceux de 1939-1945.
On peut se poser la question si malgré tous ces horreurs tous ces choix qui ont conduit à de tels chose et de vie sacrifié par la folie des hommes, reste-t-il un moyen pour que les peuples d'Europe puissent vivre dans une paix pas forcément sans conflit mais plutôt sans violence malgré tous ses innocents tués froidement peut-on vivre ensemble en paix avec un tel présent et passé ?
Si les Russes avaient en apparence le projet de « libérer » le peuple « russe » de la Crimée, au début du conflit, ils ont clairement pour ambition aujourd'hui d’assiéger leur pouvoir sur le territoire ukrainien (on peut même se demander s’ils vont s’arrêter là). Et si la Russie assiège aujourd’hui l’Ukraine, c’est parce que le gouvernement russe défend l’idée que l’Ukraine leur appartient dans le fond, et qu’ils ont tous les « droits » sur l’Ukraine. Pendant deux cents ans, l’empire russe se composait des territoires russes et ukrainiens, jusqu’à l’URSS où l’Ukraine était l’une des républiques soviétique de l’URSS et que ses frontières n’étaient qu’administratifs. Mais en 1991, l’Ukraine est devenue indépendante ; et malgré l’indépendance de l’Ukraine, le gouvernement russe a continué de penser que le territoire ukrainien leur appartenait. Cela a été une véritable humiliation pour les Russes, qui possédaient un grand et puissant empire. Ils se permettent alors de justifier tous leurs actes de vengeance sous prétexte qu’ils cherchent juste à récupérer ce qui leur appartient. Mais leurs justifications ne sont en aucun cas légitimes: l'Ukraine est un pays libre, indépendant et largement reconnu. Après avoir vu ce que les Russes ont fait jusqu’à présent en Ukraine, on ne peut réellement dire qu’il s’agit d’une guerre, ou d’un simple conflit politique, mais plutôt d’un génocide.
Les conflits actuels nous détournent, d’une certaine manière, des véritables problématiques auxquelles nous sommes confrontés depuis plusieurs années déjà, en outre l’urgence climatique. On s’attache toujours à résoudre des conflits et des problèmes à ce qu’on pourrait appeler « l’échelle humaine », en nous faisant presque oublier cette urgence climatique. Quand on regarde l’histoire de l’Homme, on se rend parfaitement compte que la guerre ralentie considérablement le progrès au sens large. Si aujourd’hui certains pays encore en développement ne progressent pas aussi vite qu’ils sont « censés » le faire, voire même ne progresse plus, c’est parce qu’ils subissent constamment des guerres civiles ou des crises politiques depuis des années. Les Nations unies ont constaté que la quasi-totalité des vingt pays les plus pauvres du monde a été déchirée par un conflit violent au cours des dernières décennies. Le développement n’a pas de pire ennemi que la guerre.
Beaucoup de politiciens s’attachent à dire qu’avant de régler le problème du climat, de l’environnement, il nous faut d’abord s’attarder sur des problèmes « plus importants » qui nous touchent directement aujourd’hui. Alors avant toute chose, nous ne pouvons déterminer avec certitude que ces problématiques-là se régleront réellement un jour prochain. Mais ensuite, le dérèglement climatique et la dégradation de l’environnement ne sont pas des événements que nous pourrons observer que dans quelques dizaines d’années: c’est aujourd’hui que nous voyons les premières conséquences de nos actions passées. Le point de « non-retour » est relativement proche, mais pas encore franchi, donc c’est dès maintenant que nous devons concrètement nous focaliser sur la question, que nous devons nous mobiliser, malgré les constants conflits politiques et guerres auxquels nous sommes confrontés.
Première partie:
L’actuelle guerre en Ukraine est-elle vraiment anachronique, comme la résurgence d’un monstre du passé ? Ce monstre n’aurait-il pas plutôt toujours été là, avec cette fois-ci, en ce qui concerne l’agression menée par la Russie sur l’Ukraine, une nouvelle proximité à l’Europe ?
Que nous les nommions Guerres, Conflits ou bien encore « Foyers de tension », tous se conjuguent au rythme de la mort et de la souffrance des peuples et ce, il nous semble, dans une constante actualité.
Ainsi, ces 20 dernières années ont-elles été le théâtre de guerres que ce soit, et cette liste n’est malheureusement pas exhaustive, au Yémen, en Irak, en Afghanistan, Syrie, Mali, Éthiopie, RDC. Ce sont surtout l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie qui payent le plus lourd tribut avec, depuis 1989, presque 2 millions de morts.
La question d’une augmentation ou bien d’une diminution du nombre de conflits à l’ère du 21ème siècle reste posée, mais il semble bien que depuis 2012, avec la guerre en Syrie, la tendance se réinscrit à la hausse. De nos jours, ce n’est plus à l’aune seule du nombre de morts qu’une guerre s’évalue, et avec l’amélioration de la logistique, de la médecine, et l’utilisation des frappes dites « chirurgicales », si l’on assiste à une baisse de la létalité des conflits, le nombre de blessés et handicapés avec séquelles définitives ne cesse d’augmenter. Aussi, quel que soit le profil des conflits, les souffrances des civils restent bien une constante avec, s’il fallait citer quelques exemples, les émigrations contraintes, le pillage ou encore le viol utilisé comme arme de guerre.
Là où la guerre en Ukraine pourrait être considérée comme une résurgence du passé, c’est dans sa nature même, en tant qu’une agression d’un État envers un autre État. En effet, au cours de ces dernières décennies, c’est le visage de la guerre qui a changé et, si l’on a assisté à une diminution des conflits inter-étatiques, c’est au profit de conflits entre groupes armés organisés.
Deuxième partie:
La potentialité de la guerre serait ainsi toujours là comme inhérente à la vie des hommes. L’état de guerre ne se limiterait pas à l’hypothèse Hobbesienne d’un état de nature où les conventions, la politique et les lois seraient absentes. C’est bien dans nos civilisations, dans nos sociétés organisées avec leurs cadres légaux que l’on voit sourdre la possibilité de la guerre. Elle serait ainsi le résultat d’une inclination « normale » des hommes dont celui-ci ne parviendrait pas à s’abstraire faute de volonté. La paix ne serait ainsi qu’une situation transitoire, alors identifiable, selon la formule de Giraudoux, comme « l’intervalle entre deux guerres », et comme la conséquence de « l’insociable sociabilité » des hommes identifiée par Kant.
On le voit, l’état de paix ne va pas de soi, il relève d’un projet : « L’état de paix n’est pas un état de nature, lequel est au contraire un état de guerre, c’est pourquoi il faut que l’état de paix soit institué », Kant, Projet de paix perpétuelle.
On oublie volontairement ou involontairement la toujours présente possibilité de la guerre et c’est peut-être là la condition récurrente de son actualisation. Celle-ci serait alors rendue possible par notre manque de volonté, comme une certaine lâcheté, un manquement à notre devoir d’œuvrer à la réification d’une paix stable et pérenne : « et, si notre fin, en ce qui concerne sa réalisation, demeure toujours un vœu pieux, nous ne nous trompons pas en admettant la maxime d’y travailler sans relâche puisqu’elle est un devoir » Kant, Métaphysique des mœurs.
Nous comporter comme si la possibilité de la guerre était toujours présente constituerait peut-être une voie vers l’institution d’un état de paix perpétuelle. Ce à la manière du » catastrophisme éclairé » que prône JP Dupuy : faire comme si la guerre était inévitable pour qu’elle n’arrive jamais. Nous ajouterons à l’inverse le devoir de toujours travailler à l’établissement de la paix.
Cette référence à JP Dupuy nous permet de terminer en faisant un parallèle entre la lutte contre le réchauffement climatique et l’établissement d’une paix durable. Toutes les deux, nous semble-t-il, relèvent d’une volonté et d’un devoir. De plus, leur construction ne peut être menée par un État isolé, elle nécessite une action inter-étatique globale et conjuguée, possible seulement dans un contexte de paix universelle.
Nous pouvons bien nous moquer de Hegel et de sa “foi” dans le monde germanique du 19eme siècle comme “maturité de l’histoire du monde”. On glose à l’envie sur les suites funestes de cet espoir. Mais n'avons nous pas, nous aussi, cru que notre monde/culture/civilisation était la forme la plus achevée, la fin de l’histoire du monde? Sinon nous ne serions pas surpris. Ce n’est pas l’indignation, la tristesse, la colère même qui interroge, mais notre surprise. Alors que les tensions entre la Russie et l’Ukraine ne datent pas d’hier, et les velléités de puissance de M Poutine non plus, comment comprendre notre sidération face à la guerre?
Sortons de la caricature “fin de l’histoire” fukuyamesque, et tentons donc de lire ce fameux “La Raison dans l’Histoire”! Hegel y élabore une conception du cours de l’histoire du monde dans laquelle il différencie le changement dans la nature, défini comme cercle qui se répète indéfiniment et le changement chez l’Homme, qui tend à la perfectibilité. Toute la différence c’est notre esprit. L’esprit, le propre de l’Homme, est ce par quoi “quelque chose de nouveau vient au jour”. Pour Hegel, l’esprit, la raison, n’est pas seulement une qualité humaine, c’est tout ce qui anime l’ensemble du réel. Et le cours de l’Histoire du monde est une succession de changements dont la fin est/sera la prise de conscience de la rationalité absolue, et l’acquisition de la liberté. L’esprit (d’un peuple) se construit sans cesse dans le changement, dans la “multitude inépuisable” de ses essais.
On peut bien se moquer de l'idéalisme de Hegel, mais c’est le même qui parcourt quasi tous les courants de pensée depuis Platon. Nous sommes surpris aujourd’hui parce que nous y avons cru. Si l’homme est un être rationnel, si le monde est rationnel, alors l’histoire a un courant. L’Histoire progresse.
Si la lecture est souvent une consolation, lire Freud nous console de nous même et de notre espoir manqué de la rationalité totale. Dans le “Malaise de la Culture” en particulier, Freud décrit sans détour nos penchants agressifs envers autrui, sous le terme de pulsion de destruction. S’y oppose la pulsion de vie, ou Eros, qui entend rassembler les individus en une humanité et qui est à l’origine de la mise en place de la culture, cette culture qui demande à l’homme d’aimer son prochain comme lui-même. C’est une “raison” bien moins séduisante que la belle raison hégélienne : la culture est imparfaite, restrictive, contraignante, à l’origine de bien des maux elle-même. Mais sans elle aucune société des hommes n’est possible. Si l’on suit la pensée de Freud, l’Histoire serait alors le résultat du combat perpétuel de ces deux pulsions. Ce que nous vivons en est un bon exemple. Nous voyons ces deux pulsions à l'œuvre, celle qui détruit et celle qui veut préserver ce qui reste de notre monde. On ne peut qu'espérer qu’Eros gagne ce combat. Mais pour paraphraser Freud, qui peut en prédire le succès?
Dans le cas de la guerre en Ukraine, nous avons fortement l'impression que c'était inévitable. Avec l'avancée de l'OTAN autour de la Russie, comme si elle se retrouvait encerclés "d'ennemis", cela laissait prédire une contre-attaque. Mais la contre-attaque de la Russie est particulière : l'on pourrait penser que c'est simplement en vue de s'opposer à l'OTAN qui l'a tant de fois rejeté, mais en réalité la Russie revendique un véritable droit sur l'Ukraine, comme étant son "bien propre". Or l'appartenance de l'Ukraine à la Russie remonte à plusieurs années, quand nous parlions encore de "l'Empire Russe" au sens littéral du terme. Pourquoi revenir à un moment si reculé de l'Histoire, et faire revivre ce qui était déjà "mort" ?
Dans un tel contexte de guerre et des revendications de la Russie, nous avons l'impression que le progrès humain s'arrête et recule de mille pas. D'un côté nous avons les atrocités de guerre, où les hommes ne se considèrent plus comme tels entre eux. D'autre part, nous avons une Russie qui ne rêve pas de progrès mais du passé. Dans de telles circonstances, nous ne pouvons ignorés la faiblesse de l'humain et la négation de son histoire comme "progrès".
Face à tant d'horreurs et de volontés de faire revivre un passé qui était, en soi, instable et peu bénéfique, nous avons véritablement du mal à concevoir les hommes comme caractérisés par le progrès. Nous avons la raison, la pensée, la réflexion, nous avons permis la naissance des sciences, des arts et de la technologie, et nous sommes toujours au stade de l'homme contre l'homme pour un territoire et au lieu de faire preuve d'ouverture d'esprit nous nous enfermons dans des ambitions passées.
Diderot a sans doute fortement raison quand il explique dans son Encyclopédie, que le progrès des sciences et des arts n'est pas linéaire mais cyclique, et qu'à un moment la raison s'obscurcira.
A la vue de tant de folies dans cette guerre en Ukraine, dans les volontés de la Russie, et dans les méthodes d'approche des autres pays, contrairement à tous ses progrès dont on a fait précédemment preuve, l'heure où la raison devient obscure a peut être sonné.
Nous avons connu le progrès et l'avancement technologique et humain; la guerre en Ukraine semble laisser ressurgir ces démons du passé qu'on a tenté d'oublier et de surpasser, et ainsi s'entame un nouveau déclin de l'Histoire humaine.
Est-ce cela le "progrès humain" : avancer, reculer, connaître le pire, avancer de nouveau et répéter l'enchaînement ?
Cela décrit bien la circularité à laquelle nous sommes confrontés chaque fois que nous souhaitons avancer : le passé ressurgi, et chaque fois que nous ventons l’Histoire comme une mémoire de nos réussites et surtout de nos erreurs passées, nous avons l’impression non pas seulement de stagner, mais surtout de régresser. Alors que l’urgence de la situation, qui se trouve on ne peut plus sous nos yeux, réclame des efforts tels que nous devons évoluer encore plus rapidement que d’habitude, sous peine de nous perdre nous-mêmes, nous lui tournons le dos et finissons par regarder ce qui était déjà pointé du doigt dans notre passé. Il est clair que nous ne pourrons avancer tant que nous répéteront les mêmes erreurs qui requièrent elles aussi une urgence de réaction, mais il l’est d’autant plus que nous ne le pourrons jamais si nous disparaissons à jamais. Il nous faut réellement apprendre de nos erreurs, et ne pas considérer que tout est déjà assimilé, que nous n’avons plus rien à apprendre de ce que nous sommes censés déjà avoir appris : les urgences nous paraissent claires, mais nous les oublions aussi vite. Tant que l’humanité ne réalisera pas, dans son ensemble, à quel point sa connaissance semble peiner dans certains champs pratiques, et même les plus urgents, peut-être n’arriverons nous jamais à prendre des décisions et agir : car les décisions n’ont de sens que si nous agissons.
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