Tous les fondamentalismes musulmans n'appellent ni ne justifient le recours à la violence armée ou au terrorisme. Souvent de nature piétiste ou fidéiste, leur programme exige, pour l'essentiel, une fidélité intransigeante au Coran et à la tradition. Le recours au djihad armé est le fait d'une minorité, sans doute bruyante, mais d'une minorité seulement. De sorte qu'il n'est nullement légitime de s'en prendre systématiquement aux fondamentalistes salafistes qui seraient, par définition, des prosélytes de la violence. On voit aujourd'hui à quelles dérives conduit l'ignorance, par exemple en matière de perquisitions administratives ou d'assignation à résidence.
Un très grand merci à Fadila Leturcq de m'autoriser à publier l'excellente et claire présentation suivante des différents mouvements salafistes :
Les frontières entre ces mouvements sont très fines pour la simple et bonne raison qu'ils se considèrent tous comme les héritiers des Salaf Salih (Pieux prédécesseurs). Pour l'ensemble de ces groupes, il faut retourner à un islam pur, des origines. Leur quotidien est rythmé par la religion, et ils mettent l'accent, dans leur pratiques, sur des éléments parfois esthétiques qui leur permettent de mieux suivre la tradition sunna: port de la barbe pour les hommes qui ne doit surtout pas être taillée, port du voile et plus généralement du jilbâb/niqâb pour les femmes, pas ou très peu de TV, pas de musique, mixité interdite...
Aussi, comme leurs pratiques et leur apparence sont quasi-similaires, il est tentant de les englober dans une seule et même catégorie : les "salafistes". Tentation à laquelle succombent même certains cadres des organes représentatifs des musulmans de France tels que le CFCM.
Malgré ces similitudes, la division entre ces groupes se base sur deux éléments:
- les savants qu'ils suivent et l'interprétation, par ces derniers, du coran et de la tradition prophétique.
- leur conception de la société.
Les salafistes d'influence wahhabite ont pour « père spirituel » le Cheikh Ibn Baz, grand savant saoudien ayant vu sa popularité exploser en Europe dans les années 80. Sectaires, ils mettent beaucoup l'accent sur l'appellation "salafi", se considérant comme la secte élue, la plus proche des enseignements du Prophète et la plus digne d'entrer au Paradis. Ils se considèrent comme l’élite de la communauté musulmane et n’hésitent pas à le faire savoir en indiquant à leurs interlocuteurs qu’ils font partie du « Minhaj » (mouvement, groupe, parti) salafi. Cette catégorie compose la majorité des salafistes dits ‘piètistes’ en France.
Ils mènent une lutte acharnée contre les autres groupes piètistes comme les Ikhwans que je qualifierais de "salafistes modernes" (c'est le cas du fameux imam de Brest qui a été sorti du Minhaj salafi par les « mises en garde » que j'ai évoqué, car il proposait d'user du "théâtre" pour faire comprendre l'Islam. Or, pour de nombreux salafis, le théâtre est une "innovation" (Bida’a), une pratique de mécréants... Idem: des intellectuels comme Tariq Ramadan sont considérés comme des Ikhwans par ces salafistes d'influence wahhabite).
Parmi leurs opposants, on trouve aussi les Tablighs, qui pratiquent un islam prosélyte: ils visitent les malades dans les hôpitaux, les jeunes à la dérive dans les banlieues pour leur proposer une autre vie, une reconversion dans l'Islâm. Ils s'adressent aux personnes en marge de la société, à des esprits vulnérables. Ils voient dans la propagation de l'islam un devoir religieux, chose que réprouvent les salafistes d'influence wahhabite.
Et enfin, on trouve en marge les Takfiris/salafistes jihadistes qui endossent toutes les caractéristiques des salafistes classiques mais pour lesquels la lutte armée contre les « mécréants » est obligatoire. Ces derniers composent les mouvements jihadistes modernes, avec d’autres groupes pas forcément « salafistes » issus de mouvements radicaux islamisés comme vous en avez fait l’analyse sur ce post de manière pertinente, de loups solitaires, de marginaux…
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